Dossier d’œuvre architecture IA95000368 | Réalisé par
Cueille Sophie
Cueille Sophie

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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Philippe Emmanuelle (Rédacteur)
Philippe Emmanuelle

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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  • inventaire topographique
lycée Gustave-Monod
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Enghien-les-Bains
  • Commune Enghien-les-Bains
  • Adresse 77 avenue de Ceinture
  • Cadastre 2020 AH 171 Sur la commune d'Enghien-les-Bains : feuille AH, parcelle 171 Sur la commune de Saint-Gratien : feuille AD, parcelles 126, 138, 139
  • Dénominations
    lycée
  • Appellations
    Gustave Monod
  • Parties constituantes non étudiées
    cour, jardin d'agrément, gymnase, atelier, logement

Un établissement pilote au bord du lac d'Enghien-les-Bains : le lycée Gustave-Monod

HISTORIQUE ET PROGRAMME

1/ Des lendemains qui déchantent : un enseignement du Second Degré en crise après la guerre

En 1945, au lendemain du conflit, l’enseignement du Second Degré (collèges et lycées) se trouve dans une situation précaire du point de vue de ses installations matérielles : aux 65 établissements déjà condamnés en 1939 pour leur vétusté et leur insalubrité, viennent s’ajouter 44 autres à reconstruire en partie ou en totalité, 120 profondément endommagés jusque dans leur gros œuvre et plus de 400 pillés à des degrés divers et réclamant une restauration intérieure.

Mais ce constat peine à masquer une autre réalité, celle-ci plus alarmante : le manque criant de lycées neufs pour répondre aux besoins d’une population scolaire en constante augmentation. En 1951, Marcel Peschard, inspecteur général de l’Instruction Publique, estime nécessaire, rien que pour le département de la Seine, la construction rapide d’au moins 25 lycées, dont 5 de garçons et 20 de jeunes filles[1]. Acquise depuis la loi du 9 août 1936[2], la prolongation de la scolarité obligatoire jusqu’à l’âge de 14 ans, combinée au baby-boom de l’après-guerre et à l’accession des filles au baccalauréat[3], provoque un afflux massif d’élèves vers les petites classes des lycées[4]. Leurs demandes sont souvent refusées ou suspendues à l’obtention d’une note moyenne minimale à un examen d’entrée que les établissements se voient contraints d’organiser face à l’insuffisance des places disponibles. Quant aux grandes classes, elles ne sont pas mieux loties : leurs effectifs avoisinent les 70 élèves et elles doivent également rejeter de trop nombreuses candidatures faute de locaux assez vastes.

Face à la gravité de cet état des lieux, il faut donc « relever les ruines, reconstruire du neuf à la place du vétuste, créer des établissements nouveaux » mais au-delà, « promouvoir des conceptions d’avant-garde » : « il ne saurait être question de perpétuer la formule des lycées-couvents, avec leurs cours étroites encloses de hautes murailles, leurs bâtisses imposantes et sévères, leurs couloirs sombres desservant des classes inconfortables », il est impératif de « concevoir une formule susceptible d’être offerte à un pays qui se relève avec la vigueur d’une jeunesse retrouvée » [5].

2/ Vers une nouvelle pédagogie

Car à l’exigence de rebâtir et cela massivement et différemment pour résorber « l’explosion scolaire » [6], vient se greffer un extraordinaire élan en faveur d’une pédagogie nouvelle. Ce dernier trouve sa source dans le divorce de plus en plus dénoncé entre l’enseignement scolaire et la vie – « l’école semble un milieu clos, imperméable aux expériences du monde »[7] - rendu encore plus flagrant par les plaies béantes laissées par la guerre dans les consciences.

L’enseignement est accusé de méconnaître dans l’élève le futur citoyen ; or il s’agit, après le choc des combats, non seulement de lui léguer un socle de connaissances, mais surtout d’en faire un individu responsable et engagé, « prêt à affronter ce qui n’a jamais été » selon la formule de Paul Valéry[8]. Gustave Monod reconnaîtra cette expérience fondatrice de la guerre – celle des tranchées de la Première Guerre mondiale qui le marqueront jusque dans sa chair[9] puis celle de résistant de la première heure en 1939-1945 - dans sa réflexion d’enseignant et de réformateur : « j’ai été mêlé à la grande foule car, pendant les quatre années de la guerre de 1914, j’ai été soldat de deuxième classe, c’est-à-dire tout proche du plus humble. C’est la plus profonde expérience humaine que j’ai eue à traverser […] j’ai trouvé parmi mes camarades de section des trésors de cœur, de caractère, d’intelligence aussi, que les études primaires n’avaient pas mis à jour et que les circonstances de la guerre révélaient […] j’aspire donc à une pédagogie qui irait au-devant des possibilités humaines que chacun porte en soi […] qui donnerait à chacun la possibilité de s’élever »[10].  

A la Libération, les conditions sont réunies pour que cette aspiration à un enseignement à la fois démocratisé dans son accès et recentré sur les aptitudes de chaque élève, formulée durant l’entre-deux-guerres par les « Compagnons de l’Université nouvelle »[11] et les tenants de « l’Education nouvelle »[12], trouve son aboutissement dans un ambitieux projet, plus tard rebaptisé « plan Langevin-Wallon » – du nom des deux présidents successifs – Paul Langevin puis Henri Wallon[13] – nommés à la tête de la Commission ministérielle d’études pour la réforme de l’enseignement instaurée le 8 novembre 1944 par le ministre de l’Education nationale, René Capitant[14].

Composée de sommités intellectuelles, parmi lesquelles l’historien Lucien Febvre, fondateur des Annales ou le latiniste Marcel Durry, mais aussi des directeurs du ministère (dont Gustave Monod) et d’enseignants, elle se met rapidement au travail, au rythme d’une séance hebdomadaire (elle en tint 68). Malgré la maladie puis le décès de Paul Langevin en 1946, elle remet son rapport final le 19 juin 1947.

Bien que rapidement condamné par un contexte économique difficile et surtout par un manque de soutiens politiques[15], le plan Langevin-Wallon, devenu « un testament plus qu’un programme [16]», va toutefois connaître une application concrète : l’expérience des « classes nouvelles », instituées dans l’enseignement du second degré simultanément aux travaux de la commission[17]. 

 3/ Une personnalité-clef : Gustave Monod

Grand serviteur de l’Etat et personnalité engagée, Gustave Monod[18] en est le principal artisan.

Né en 1885 à Mazamet, dans le Tarn, au sein d’une famille de pasteurs protestants qui compta d’autres illustres figures[19], Gustave Monod fait ses études primaires et secondaires à Roubaix et à Pau (où il a pour condisciple Alexis Léger, futur secrétaire général du Ministère des Affaires étrangères, qui deviendra poète sous le nom de Saint-John Perse). Il obtient son baccalauréat ès lettres en 1904 à Bordeaux puis poursuit ses études à Montpellier et à Paris. Agrégé de philosophie en 1912, c’est dans l’attente d’un poste qu’il enseigne à l’Ecole des Roches, près de Verneuil-sur-Avre, fondée en 1899 par Edmond Demolins, un fervent adepte des « méthodes actives » de pédagogie[20].

Appelé sous les drapeaux dès le début de la Première Guerre mondiale (août 1914), il renonce à être officier et accepte d’aller au front comme ambulancier. Blessé à deux reprises, il est démobilisé puis réformé le 21 décembre 1918 après avoir été amputé de la jambe droite à Douaumont et déclaré invalide de guerre à 80 %.

En 1919, il reprend sa carrière de professeur de philosophie dans divers lycées de province, à Toulon, Avignon, Reims, Tours et Marseille, avant d’être nommé au lycée Michelet de Vanves en octobre 1932. Il s’engage alors dans une grande œuvre civique, « les Compagnons de l’Université nouvelle », un groupe d’universitaires qui souhaite réformer en profondeur l’enseignement secondaire avec pour devise : « les pères ont veillé dans les mêmes tranchées, partout où cela est réalisable les fils peuvent s’asseoir sur les mêmes bancs »[21].

En 1933, Gustave Monod est appelé au cabinet d’Anatole de Monzie, ministre de l’Education nationale. Il continue parallèlement d’exercer comme professeur de philosophie au lycée d’application de l’Ecole normale supérieure de jeunes filles de Sèvres (octobre 1933-septembre 1934)[22]. Inspecteur de l’académie de Paris en 1936, puis Inspecteur général de l’Instruction publique de 1937 à 1939, il participe aux travaux du Congrès du Havre (1936), où germe l’idée des « classes d’orientation », que Jean Zay, ministre de l’Education nationale du Front populaire, demande à Monod de coordonner. Les « classes nouvelles » en seront quelques années plus tard « comme le lointain écho ».[23]

Pour pouvoir les mettre en œuvre, Monod devra attendre sa « réhabilitation »[24]. En 1940, il refuse en effet de se soumettre au gouvernement de Vichy, qui exige de lui qu’il fournisse une liste des enseignants juifs. Il est donc révoqué et rétrogradé dans le corps des professeurs agrégés. Pour être plus libre, il préfère quitter ses fonctions et demande à être précocement admis à la retraite en octobre 1941. Retiré dans l’Aude, il participe activement au réseau de résistance « Défense de la France ». A la Libération, René Capitant le promeut directeur de l’Enseignement du Second Degré le 1er janvier 1945 – poste qu’il occupera jusqu’en 1951. C’est à ce titre qu’il lance l’expérience des « classes nouvelles » - qui resteront aussi connues sous le nom de « classes nouvelles de la Libération ». 

4/ Une expérience novatrice et visionnaire : les classes nouvelles

Il s’agit, au sein d’un second degré réorganisé en deux cycles – le premier dit « d’orientation » (de 11 à 15 ans) comprenant des matières de base faisant l’objet d’un enseignement commun et une gamme variée d’options allant de l’apprentissage des langues mortes à des travaux manuels, et le second qualifié « de détermination » (de 15 à 18 ans), consacré à la formation du citoyen et du travailleur, divisé en trois branches, pratique, professionnelle et technique – de mettre en place de nouveaux principes de fonctionnement :

-          Les classes, parfois mixtes, sont à effectifs réduits, limités à vingt-cinq élèves volontaires pour rendre l’enseignement collectif plus actif et plus individualisé ;

-          Chaque classe est confiée à une équipe pédagogique resserrée qui, grâce à la tenue de conseils de classe réguliers, peut mettre en commun ses observations sur les élèves et adapter les objectifs de chacun au plus près de ses aptitudes ;

-          La discipline est en partie prise en charge par les élèves eux-mêmes : « à la discipline autoritaire et distante, imposée du dehors, on a voulu substituer un régime de discipline consentie, voulue et organisée partiellement par les enfants ; il s’agit en premier lieu de faire tomber toutes les barrières de faux respect et surtout de crainte qui donnent à l’élève une attitude artificielle, composée, quand ce n’est pas hypocrite et ce réflexe de défense à l’égard de l’adulte tout-puissant qui ne permet guère une action efficace de l’éducateur »[25] ;

-          Par souci d’une « éducation intégrale », on introduit, à côté des disciplines intellectuelles et de l’éducation physique, de l’éducation artistique (plastique, musicale et théâtrale), des travaux manuels éducatifs (céramique, couture, métaux en feuilles, reliure…) et « l’étude du milieu »[26] ;

-          L’emploi du temps quotidien est divisé en deux parties bien distinctes : le matin, les apprentissages fondamentaux (français, instruction civique et morale, langues vivantes, histoire et géographie, mathématiques, sciences d’observation) et l’après-midi, les autres enseignements (latin, étude du milieu, éducation physique, travaux manuels, dessin, musique, expression théâtrale) ;

-          Professeurs et élèves ont recours aux « méthodes actives » comme procédé d’acquisition des connaissances : travail dirigé collectif ou individuel, mobilisation de l’effort et de la volonté d’apprendre, sollicitation des centres d’intérêt.

-          Le lien avec les familles est renforcé par de fréquentes réunions[27].

Derrière ces classes nouvelles se dessine en creux une idée maîtresse : celle « qu’aucun enfant ne perde sa chance de devenir tout ce qu’il peut être, au bénéfice autant de l’individu que de la société »[28]. Gustave Monod annonce leur création dès le 2 juillet 1945 dans une note adressée aux chefs d’établissements puis précise les modalités de leur instauration dans une circulaire du 20 août 1945, qui sera suivie de nombreuses autres[29].

En octobre 1945, ce sont près de 150 sixièmes nouvelles qui ouvrent leurs portes sur l’ensemble du territoire, avant que l’expérience ne soit progressivement étendue aux cinquièmes, quatrièmes et enfin troisièmes à la rentrée 1949 : on dénombre alors 844 classes nouvelles réparties dans 199 établissements différents.

5/ Des lycées-pilotes

 Dès la Libération, en effet, Gustave Monod s’attache à créer des « établissements d’un genre nouveau » ayant pour référence explicite l’internat à la campagne. Aidé par le Ministère des Finances, il commence « à acheter, à des conditions très diverses, dans la périphérie de certaines grandes villes, des propriétés où il y avait parfois des constructions existantes » [30] et à les réaménager en lycées-pilotes, ainsi baptisés parce qu’ils ne comportent que des classes nouvelles dans la totalité de leur cursus.

C’est le cas des lycées de Marseilleveyre, Toulouse-Bellevue, du lycée Grand Air d’Arcachon et autour de la capitale, des lycées de Sèvres, Montgeron, Enghien-les-Bains et de la Folie-Saint-James à Neuilly, destinés à devenir des vitrines de la réforme. « Je serais très heureux si un jour ou l’autre, la presse pouvait s’intéresser à ces établissements de la banlieue parisienne où nous faisons un effort considérable. Nous essayons de décongestionner Paris en créant […] des lycées aérés et où le régime scolaire soit plus libre et plus souple qu’à l’intérieur de la Cité »[31] déclare en 1948 Gustave Monod aux journalistes.

Figurant parmi les établissements modèles présentés dans l’exposition organisée en 1952 par le Ministère de l’Education nationale à l’Ecole supérieure des Beaux-Arts du quai Malaquais (Paris, 6e arrondissement), en partenariat avec la revue L’Architecture française [32], le lycée-pilote d’Enghien-les-Bains, mis en chanter dès 1950, est à la fois le reflet de la volonté de Gustave Monod d’implanter en Île-de-France des annexes de grands lycées parisiens, mais également d’en faire des laboratoires pédagogiques. Sa naissance résulte en effet d’un commun accord entre les deux directions de l’Enseignement du Second degré et de l’Enseignement technique pour tenter à Enghien un essai : celui d’associer à une formation classique et moderne un centre d’apprentissage.

6/ Aux origines du lycée d’Enghien-les-Bains : deux maisons de notable au bord du lac  

Avant la guerre, les élèves de la vallée de Montmorency, ne disposant, à proximité, d’aucun lycée ou collège, fréquentaient, selon les commodités ferroviaires, les lycées de la bordure septentrionale de Paris : Jacques Decour, Condorcet, Chaptal, Lamartine ou Jules Ferry.

Révolutionnant cette carte scolaire, le lycée d’Enghien-les-Bains ouvre ses portes le 1er octobre 1946 sous la forme d’une annexe mixte du lycée Claude Bernard (Paris, 16e arrondissement). Coupé en deux par l’avenue de la Ceinture, il se trouve à cheval sur deux communes : Enghien-les-Bains et Saint-Gratien, dont la frontière passe au milieu de la cour centrale.

L’établissement est implanté sur deux propriétés, connues sous le nom de « château d’Enghien » et de « château Léon », séparées par un bras du lac d’Enghien (aujourd’hui comblé[33]). Celles-ci étaient incluses au XVIIe siècle dans le parc que le maréchal de Catinat avait aménagé devant son château de Saint-Gratien jusqu’aux rives de l’étang de Montmorency.

Vers 1845, la maison de notable dite « château d’Enghien »[34] est érigée pour l’un des premiers maires d’Enghien, Jules Robin, dont l’épouse, Caroline Foster, était anglaise – ce qui explique peut-être l’aspect de l’édifice, proche des cottages de brique d’Outre-Manche. Vers la fin des années 1850, Emile de Girardin, économiste, journaliste et conseiller municipal de la ville de 1865 à 1870, en fait sa maison de villégiature. Un guide d’Enghien et de ses environ la décrit en ces termes en 1862 : « un peu plus loin dans une presqu’île formée par les sinuosités du lac s’élève un château d’un style à la fois bizarre et pittoresque. Il est habité aujourd’hui par M. Emile de Girardin. L’éminent publiciste y reçoit chaque année, à l’époque des régates et de la fête patronale, l’élite du monde parisien et ses nombreux amis qui trouvent le plus gracieux accueil dans cette maison où l’élégance de la vie parisienne est unie au confortable anglais »[35]. Girardin vend la demeure en 1868. Sa dernière propriétaire connue décède sans héritiers en 1942 et le château entouré d’un parc de près de 24 000 m2 tombe en déshérence avant d’être racheté par l’Etat. Dès septembre 1945, après le départ des autorités américaines qui l’avait occupé durant quelques mois à la fin de la guerre, il est loué par les Domaines à l’Education nationale et doté de sept classes et d’un laboratoire, installés dans des bâtiments de bois au confort sommaire[36].

Par décret du 31 juillet 1950 est prononcée l’affectation définitive du terrain à l’Education nationale en vue d’y bâtir une annexe du lycée Claude Bernard. Un ambitieux projet est conçu par Georges Martin, formé à l’Ecole des Beaux-Arts dans l’atelier de Gustave Umbdenstock – justement auteur de l’établissement de la porte Molitor – et architecte en chef des Bâtiments civils et des Palais nationaux.

Le nombre croissant d’élèves et le large périmètre de recrutement de ceux-ci (en 1960, ils proviennent de 72 communes différentes, même si la plupart est issue des agglomérations d’Enghien, Saint-Gratien, Epinay-sur-Seine, Deuil-la-Barre et Eaubonne[37]) rendent nécessaire l’acquisition de deux autres parcelles contiguës à la première : celle du n° 73, avenue de la Ceinture (1800 m2) et surtout celle du « château Léon » (5500 m2)[38], achetée le 7 septembre 1950 à une société immobilière. L’ensemble est ainsi porté à plus de trois hectares, auxquels s’ajoutent par la suite les terrains acquis sur le territoire de Saint-Gratien et destinés à l’édification des ateliers du lycée et du centre d’apprentissage (représentant 10 200 m2 supplémentaires).

7/ Un lycée mixte pour 1050 élèves, rapidement dépassé par la montée de ses effectifs

Les nouveaux bâtiments sont construits entre 1953 et 1958 mais les deux maisons de notable initiales sont conservées et réservées à l’administration.

Lycée-pilote d’enseignement classique, moderne et technique, conçu pour 1050 élèves, l’établissement est vite dépassé par l’afflux de candidatures : à la rentrée 1961, il accueille déjà 2517 élèves (1408 garçons et 1109 filles). Par un décret du 5 juin 1954, il passe du statut d’annexe mixte du lycée Claude Bernard à celui de lycée autonome[39] et commence lui-même à « essaimer » des annexes en plus lointaine banlieue, à Ermont, Argenteuil puis Taverny.

En dépit des complications occasionnées par la nature du terrain (il faut assécher le bras du lac qui pénètre dans le parc), les travaux sont menés rapidement et leur réception définitive a lieu le 7 février 1958 [40].

[1] PESCHARD, Marcel, « Les Etablissements de l’Enseignement du Second Degré », L’Architecture d’aujourd’hui, n° 34, février-mars 1951, pp. 6-10.

[2] Loi sur l’Instruction primaire obligatoire du 9 août 1936.

[3] Devenue possible dès 1924.

[4] Rappelons que jusqu’en 1959, le terme « lycée » désignait des établissements financés par l’Etat couvrant l’ensemble de l’enseignement secondaire long (de la sixième à la terminale), par opposition aux collèges dépendant des communes.

[5] PESCHARD, Marcel, « Les Etablissements de l’Enseignement du Second Degré », L’Architecture d’aujourd’hui, n° 34, février-mars 1951, p.7. 

[6] CROS, Louis, L’explosion scolaire, Paris, Comité universitaire d’information pédagogique, 1961.

[7] SOREL, Etya, Une ambition pour l’école : le plan Langevin-Wallon (1943-1947), Paris, Editions sociales, 1997, p. 204.

[8] Reprise en introduction de l’ouvrage de Charles BRUNOLD, Demain ils seront des hommes, aspects divers du problème scolaire, Paris, Hatier, 1963.

[9] Gravement blessé en mars 1918 par un obus sur le front devant Orvilliers-Sorel (Oise), il sera amputé à deux reprises de sa jambe droite, qui le fera souffrir jusqu’à la fin de sa vie.

[10] RUOLT, Anne, « L’héritage pédagogique de Gustave Monod (1885-1968), ou quelle (s) filiation (s) pour l’Education nouvelle ? », Eduquer-former, 2014, 1-2, n° 46, p. 171.

[11] Créée le 10 octobre 1918, cette organisation, constituée d’universitaires qui s’étaient connus dans les tranchées, revendiquait une Ecole unique, où la sélection se ferait par le mérite scolaire et non par l’argent et critiquait violemment l’existence de deux enseignements, l’un pour les masses travailleuses et l’autre pour les enfants de la bourgeoisie ; elle soutenait ainsi la gratuité du secondaire, alors payant.

[12] Ce courant pédagogique défendant le principe d’un enfant contribuant activement à sa propre formation, visant autant à acquérir des connaissances qu’à développer globalement sa personne, était représenté par des personnalités aussi diverses qu’Edmond Demolins, fondateur en 1899 de l’Ecole des Roches à Verneuil-sur-Avre (Eure), Maria Montessori, médecin et pédagogue italienne ou encore Ovide Decroly, psychologue belge, la plupart regroupés au sein d’une Ligue internationale pour l’Ecole nouvelle, fondée en 1921. A ce sujet, voir BLOCH, Marc-André, Philosophie de l’Education nouvelle, Paris, Presses Universitaires de France, 1973.

[13] Tous deux professeurs au Collège de France, le premier physicien et le second médecin et psychologue.

[14] Sur ce plan Langevin-Wallon, voir : GUTIERREZ, Laurent et KAHN, Pierre, Le plan Langevin-Wallon, Histoire et actualité d’une réforme de l’enseignement, Nancy, Editions universitaires de Lorraine, 2016.

[15] PROST, Antoine, « Une réforme morte-née : le plan Langevin-Wallon », Paul Langevin et la réforme de l’enseignement, actes du séminaire tenu à l’ESPCI ParisTech du 15 janvier au 14 mai 2009, sous la dir. de Laurent GUTIERREZ et Catherine KOUNELIS, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2010, pp. 55-69.

[16] PROST, Antoine, « Le plan Langevin-Wallon et les classes nouvelles », Du changement dans l’école, les réformes de l’éducation de 1936 à nos jours, pp. 55-64.

[17] Elles s’inspiraient de l’expérience des classes d’orientation adoptées sous Jean Zay.

[18] Sur ce personnage, voir : Gustave Monod, un pionnier en éducation, sous la dir. de Louis CROS, Paris, CEMEA, 1981. 

[19] Dont celles de Gabriel Monod (1844-1912), historien et cofondateur, avec son ami Lucien Febvre, du mouvement des Annales ; Jacques Monod (1910-1976), biologiste et prix Nobel de médecine en 1965 et le naturaliste et grand explorateur Théodore Monod (1902-2000).

[20] LECOQ, Tristan, LEDERLE Annick, Gustave Monod, une certaine idée de l’école, Sèvres, Centre International d’Etudes Pédagogiques, 2008, p. 11.  

[21] RUOLT, Anne, « L’héritage pédagogique de Gustave Monod (1885-1968), ou quelle (s) filiation (s) pour l’Education nouvelle ? », Eduquer-former, 2014, 1-2, n° 46, p. 175.

[22] Voir la fiche relative à ce lycée, actuel collège.

[23] LECOQ, Tristan, LEDERLE Annick, Gustave Monod, une certaine idée de l’école, Sèvres, Centre International d’Etudes Pédagogiques, 2008, p. 40.

[24] RUOLT, Anne, « L’héritage pédagogique de Gustave Monod (1885-1968), ou quelle (s) filiation (s) pour l’Education nouvelle ? », Eduquer-former, 2014, 1-2, n° 46, p. 176.

 

[25] GAL, Roger, La réforme de l’enseignement et les classes nouvelles, Paris, Les Presses d’Île-de-France, 1946, p. 51.

[26] Dont Alfred Weiler, directeur du lycée-pilote de Montgeron (Essonne), annexe du lycée Henri IV de Paris, fut le plus grand spécialiste en France.

[27] SAVOYE, Antoine, « Langevin et l’expérience des classes nouvelles, une préfiguration de la réforme de l’enseignement », Paul Langevin et la réforme de l’enseignement, actes du séminaire tenu à l’ESPCI ParisTech du 15 janvier au 14 mai 2009, sous la dir. de Laurent GUTIERREZ et Catherine KOUNELIS, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2010, pp. 107-120.

[28] GEORGE, Jacques, « Le plan Langevin-Wallon, les classes nouvelles et les Cahiers pédagogiques », Le plan Langevin-Wallon, une utopie vivante, actes des rencontres Langevin-Wallon, 6-7 juin 1997, sous la dir. de Pierre BOUTAN et Etya SOREL, Paris, Presses universitaires de France, 1998, p. 51.

[29] Tous ces textes fondateurs sont compilés dans une publication du Ministère de l’Education nationale : Les classes nouvelles, Paris, Imprimerie nationale, 1950.

[30] Archives nationales, F 17 17776, correspondance de Gustave Monod, « Défense du second degré », conférence de presse donnée le 15 décembre 1948 par M. Monod, directeur de l’Enseignement du Second Degré, p. 13.

[31] Ibid.  

[32] « Annexe du lycée Claude Bernard à Enghien-les-Bains – architecte G. Martin », L’Architecture française, n° 129-130, 1952, p. 111.

[33] Il se trouvait à l’emplacement du gymnase.

[34] Sur cet édifice, voir la notice architecturale de l’inventaire général du patrimoine culturel, extraite de la base Mérimée [en ligne], consultée le 2 juin 2020. URL : https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/IA95000255

[35] BORDE, M. (proviseur), « Le lycée d’Enghien, origine et évolution », Bulletin du lycée d’Enghien, n° 2, mars 1961, p. 3.

[36] Sur le lycée Gustave Monod d’Enghien-les-Bains, voir la notice architecturale de l’inventaire général du patrimoine culturel, extraite de la base Mérimée [en ligne], consultée le 2 juin 2020. URL : https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/IA95000368

[37] BORDE, M. (proviseur), « Le lycée d’Enghien, origine et évolution », Bulletin du lycée d’Enghien, n° 2, mars 1961, p. 2. 

[38] Sur cet édifice, voir la notice architecturale de l’inventaire général du patrimoine culturel, extraite de la base Mérimée [en ligne], consultée le 2 juin 2020. URL : https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/IA95000254

[39] Archives nationales, AJ 16 8580, lettre du Ministre de l’Education nationale à Monsieur le recteur de l’Académie de Paris, le 24 juin 1954.

[40] Archives nationales, AJ 16 8580, rapport de l’Inspecteur général de l’Instruction Publique chargé des constructions du Second Degré, R. Plande, le 7 février 1958, sur le lycée d’Enghien-les-Bains (Seine-et-Oise).   

DESCRIPTION

Implantation et plan

Sur la partie d’Enghien, le lycée se compose de trois bâtiments disposés autour de terrains de sport (basket et volley-ball) et d’une vaste cour centrale. Le premier pavillon construit (A), donnant sur l’avenue de la Ceinture, est prévu pour 850 élèves avec, au second étage, les classes spécialisées et laboratoires de physique-chimie, ainsi qu’un cabinet de collections utiles aux enseignements scientifiques (fossiles, animaux taxidermisés, squelettes, roches, etc.). De plan rectangulaire régulier, il se développe en léger retrait par rapport à la rue et se démarque, à l’angle sud-ouest, par une extrémité arrondie, qui abrite la cage d’escalier et a pour particularité d’être éclairée par une longue baie verticale et par trois ouvertures en forme de hublots. Son entrée s’effectue par un petit vestibule en demi-hors-œuvre surmonté d’un auvent, qui a conservé son sol en granito, ses portes battantes en chêne et sa loge de gardien.

Le second pavillon (C), plus compact, est celui des cuisines et des réfectoires. Il occupe une situation privilégiée, en bordure du lac, qui lui vaudra le nom de « restaurant des bords de l’eau ». Il comprend six salles à manger de 50 couverts, trois pour les filles et trois pour les garçons ainsi qu’une salle pour les maîtres et pour le personnel. Son unique étage carré reçoit quelques appartements de fonction.

Le troisième pavillon (B), dont la réception est organisée le 17 février 1957[1], est le plus proche du château Léon. Long de 110 mètres et ouvert vers le sud, il est, à l’origine, destiné aux jeunes filles. Outre les salles d’enseignement général, il comporte également des classes de dessin, de musique et une infirmerie. 

En 1955-1956 est édifié un gymnase, pouvant être séparé en deux (filles / garçons) par une cloison mobile, avec une couverture à faible pente en aluminium[2].

Les deux demeures existantes, le château Léon (E) et le château d’Enghien (D), sont réaménagées pour l’administration (bureaux du proviseur, intendance, etc.) et d’autres appartements.

Le reste de l’établissement se déploie de l’autre côté de l’avenue de la Ceinture, sur la commune voisine, avec des ateliers réservés à l'éducation technique et un grand bâtiment de salles de classes. Cette partie est dénommée « centre d'apprentissage de Saint Gratien ». Les métiers enseignés sont l'ajustage, l'électricité, la serrurerie, la maçonnerie, la plomberie, la peinture, la menuiserie et la charpente.

Traitement des façades et matériaux constructifs

Les bâtiments sont érigés en respectant les plantations existantes. La hauteur des constructions est maintenue assez basse pour ne pas gâcher le panorama sur le lac et le choix des matériaux (briques roses, tonalités blanches des menuiseries, toitures en ardoise) est défini « pour s’harmoniser au cadre de verdure et au décor du paysage naturel environnant »[3].

Les élévations de l'ensemble du lycée sont d'une architecture très linéaire, rythmée par des travées régulières, qui se fait encore l'écho des années Trente - notamment dans le style "paquebot" de la cantine et de l'angle arrondi du pavillon sur l'avenue de la Ceinture.

Les murs sont en briques, « avec un parement en brique de premier choix, de ton rosé ».[4]

Le travail d’appareillage est remarquable, avec des joints soignés et des briques posées à la réglette.

« A l’intérieur des pilastres particulièrement chargés et qui ne seraient pas de dimensions suffisantes pour être constitués uniquement en brique, [sont] coulés des poteaux en béton armé formant ossature »[5]. 

Les larges fenêtres sont cernées d'un épais encadrement en pierre d’Euville reconstituée, méticuleusement grésée, qui se concilie parfaitement avec le blanc des menuiseries. Celles de la cantine, qui puisent leur abondante lumière au sud, côté lac, sont équipées d’un système à guillotine. 

Dans les couloirs, les sols sont revêtus de granito et les murs de grès cérame.

Les pavillons sont couronnés de toits à faible pente couverts d'ardoises d'Angers.

Dans chacun d’eux, les escaliers sont éclairés par des baies de la hauteur de deux niveaux. Tournants et à retour, ils présentent des rampes en fer forgé à motifs géométriques d’une grande qualité d’exécution.

Les ateliers du centre d’apprentissage sont surmontés de sheds.

UN DECOR EXCEPTIONNEL

Le décor du lycée Gustave Monod résulte du décret du 18 mai 1951 publié par le ministère de l'Education nationale, qui demande que tout projet de construction scolaire bénéficie de travaux de décoration s'élevant au minimum à 1% du total des travaux de construction. Cette décision a pour triple mission de favoriser la présence de l'art auprès de la jeunesse, d’aider les artistes à vivre de leur travail en développant la commande publique et de favoriser l’intégration de l’art dans l’architecture.

Le choix de l’artiste et du projet résulte d’une entente entre le maître d’ouvrage et l’architecte puis est agréé par la commission consultative des achats et des commandes de l’Etat, instaurée par un arrêté du 28 juin 1949 auprès de la Direction générale des Arts et des Lettres.

L'architecte Georges Martin s'engage dans la procédure dès le début du chantier, en juillet 1951, faisant du décor de ce lycée-pilote d’Enghien l'une des toutes premières expériences en la matière en France.

L’ampleur exceptionnelle du programme adopté conduit à la tenue de pas moins de cinq commissions au total pour sélectionner les artistes : celles du 23 janvier 1952, du 22 octobre 1954 et du 28 juin 1956 pour le lycée lui-même[6] et celles du 12 mai 1954[7] et du 15 octobre 1963 pour le centre d’apprentissage[8].

Ainsi la sculpture est confiée à Henri Lagriffoul et la peinture à Le Feuvre, Yves Brayer, Roger Chapelain-Midy, Jacques Despierre, André Planson, Emile Saboureau et Louis Berthommé Saint-André.

La réalisation s’échelonne donc en cinq campagnes :

-          1952 : le décor du bâtiment donnant sur l'avenue de la Ceinture (dit bâtiment A) avec le bas-relief de Lagriffoul et les peintures de Le Feuvre dans le hall d'entrée.

-          1954 : le décor du centre d'apprentissage de Saint-Gratien avec la frise sculptée de Lagriffoul.

-          1954-1957 : le décor du bâtiment B avec six toiles disparues de Berthommé Saint-André pour le couloir de l’entrée donnant sur la rue du Château Léon et trois panneaux de Jacques Despierre pour le vestibule sur cour.

-          1954-1957 : le décor du réfectoire (bâtiment C) avec six toiles marouflées d’Yves Brayer, Roger Chapelain-Midy, Jacques Despierre, André Planson, Emile Saboureau et Louis Berthommé Saint-André.

-          1963 : l’exécution d’une toile de Louis Berthommé Saint-André pour le hall d’entrée du centre d’apprentissage, représentant une régate sur le lac d’Enghien et le casino en arrière-plan.

Une partie de ce décor a fait l'objet d'une protection au titre des Monuments historiques, inscription au titre des objets mobiliers (arrêté du 10 décembre 2008). Cette protection concerne les six peintures du réfectoire, les trois du vestibule donnant sur la cour du bâtiment B et celle du hall d’entrée du centre d'apprentissage[9].

DETAIL DES DIFFERENTES COMMANDES AU TITRE DU 1% ARTISTIQUE

[Textes extraits de la publication de Sophie Cueille, Enghien-les-Bains, architecture et décors, Inventaire général du patrimoine culturel / Région Île-de-France, collection Images du Patrimoine n° 255, Paris, Somogy, 2009, pp. 162-171]

1/ 1952 : le décor du bâtiment donnant sur l'avenue de la Ceinture (dit bâtiment A)

Bas-relief de la façade du bâtiment A du lycée Gustave Monod (71, avenue de la Ceinture)

Henri Lagriffoul (1907-1981) compose pour la façade d’entrée du lycée un vaste bas-relief de 2, 2 mètres sur 2, 1 mètres en pierre d’Euville, les Trois Enseignements, le classique, le technique et le moderne, illustrant le nouveau programme pédagogique expérimental du lycée-pilote. Trois personnages féminins portent les attributs correspondants : le masque de la comédie pour évoquer la littérature classique, un oranger et une rose des vents pour les sciences de la nature, une équerre évoquant vraisemblablement les arts appliqués et modernes. L’artiste, élève de Landowski et premier Prix de Rome en 1932, est alors un sculpteur reconnu. En 1945, il est nommé professeur à l’Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts, où il se passionne pour la pédagogie. Sculpteur particulièrement attaché à la collaboration avec les architectes, il est notamment l’auteur, pour l’Exposition internationale de 1937, des grands bas-reliefs destinés au Palais de Chaillot et, en 1950, du décor de la façade de la faculté de médecine de Paris.

Le décor du vestibule d’entrée

En 1952, le peintre Le Feuvre, ancien professeur de l’Ecole des Beaux-Arts, exécute deux frises de 8 mètres sur 1, 05 mètres et un plafond de 45 m2, le tout peint sur des toiles marouflées. Ces frises illustrent à nouveau les orientations du lycée avec la représentation de l’enseignement littéraire à droite en entrant dans l’établissement et l’enseignement technique et moderne à gauche.

Dans la première, les grands courants de la littérature allant du Moyen Âge aux temps modernes sont déclinés ; œuvres religieuses médiévales, poésie troubadour et courtoise, littérature de la Renaissance (Rabelais et Du Bellay), théâtre classique de Molière (évoquant les Précieuses ridicules, le Bourgeois gentilhomme et le Malade imaginaire) et de Racine (le jansénisme de Port-Royal), les grands auteurs du siècle des Lumières, Voltaire et Rousseau, pour finir avec la littérature moderne avec Zola, Flaubert, Victor Hugo…

En face sont représentées les victoires de l’homme sur les sciences : âges de la pierre et du fer, le temps des constructeurs de cathédrales, les découvertes de la chimie, les grandes manufactures, la machine à vapeur de Denis Papin, l’ère industrielle et les temps modernes de la science, l’aéronautique, la communication, l’image télévisée et la robotique.

Derrière les personnages apparaissent des paysages ou des objets, simplement dessinés en noir, qui évoquent les cadres historiques correspondants : château fort, abbaye, château de Versailles, moulin, usine, temple grec pour la partie littéraire et dans la seconde frise, abris dans les arbres, cathédrale, château, machine à imprimer, manufacture, usine, électricité, train, avion, tour Eiffel.

Sur le plafond, le peintre figure les tentatives humaines aboutissant à l’aviation actuelle, allant du vol d’Icare à la fusée supersonique, en passant par les oiseaux, la montgolfière, l'aéroplane, la machine de Léonard de Vinci, l’hydravion - le tout dans un ciel de nuages dont les percées laissent voir le soleil et la lune.

Malgré la notoriété de l’artiste, en fin de carrière il est vrai, l’ensemble du décor ne soulève pas l’enthousiasme de ses contemporains, l’inspecteur des Beaux-Arts parlant même d’un « style périmé, de figures désuètes et falotes relevant bien plus de l’imagerie que de l’art pictural » et d'un « plafond où les tentatives de modernisme de l'artiste se bornent à la représentation d'avion à réaction, nageant dans un ciel pâle et évanescent. En un mot, le comble du grand art aux alentours de 1880 » !  Aujourd’hui, il reste le témoignage d’une peinture académique à visée pédagogique, rappelant les grandes illustrations que les professeurs accrochaient à cette époque sur les tableaux noirs.

2/ 1954 : le décor du centre d’apprentissage de Saint-Gratien

Frise de la façade du bâtiment dédié à l’enseignement professionnel 

Henri Lagriffoul est également l’auteur, en 1954, de la grande frise qui orne la façade du centre d’apprentissage de Saint-Gratien. Pour cette seconde tranche de travaux, le sculpteur est chargé de la réalisation d’un bas-relief de céramique polychrome de 7, 5 mètres sur 1, 5 mètres couronnant la partie supérieure de l’élévation des ateliers et formant retour.

La lecture du thème retenu, Les Techniques enseignées dans le centre d’apprentissage, se fait de gauche à droite : les arts du feu (le forgeron se saisissant de la matière brute dans le feu, les bienfaits de la maîtrise de l’électricité symbolisée par le personnage féminin et l’éclair, le savoir technique et sa transmission incarnée par la clef que le forgeron donne à l’ingénieur) ; les sciences expérimentales appliquées (représentées par le mythe d’Œdipe, transformé en un simple lycéen répondant à l’énigme du sphynx posé sur une colonne, et la chouette d’Athéna, déesse des Arts, des Sciences et de l’Industrie) puis le commerce et les voyages en mer (illustrés par un arlequin ouvrant un rideau de scène pour dévoiler la mesure de l’univers, mappemonde et carte donnant accès à la navigation et au voyage, figuré par le dieu messager Mercure ou Hermès, situé sur le retour de la frise, avec ses attributs - caducée, sandales et casque ailés).

3/ 1954-1957 : le décor du bâtiment B (le long de l’avenue du château Léon)

La troisième tranche de travaux de décoration concerne le bâtiment B, qui longe la rue du Château Léon. La construction en est achevée en 1955 et le décor posé en 1957. Le programme était particulièrement riche dans un lieu très fréquenté par les élèves qui, pour nombre d'entre eux, empruntaient cet accès pour pénétrer dans le lycée.  

Il comportait :

-          Dans le couloir de l’entrée donnant sur la rue, six grands panneaux formant une surface totale de 32 m² de toile marouflée, aujourd’hui disparus. Ils avaient été exécutés par le peintre Louis Berthommé Saint-André sur le thème des « Jeux de plein air », « du printemps et de l’automne » et des « fleurs et fruits ». Les sujets choisis pour illustrer chacun d’entre eux étaient « le colin-maillard » et « les quatre coins » (pour les Jeux) ; « la cueillette des cerises [les fameuses cerises de Montmorency] et « la cueillette du raisin » (pour les saisons). Pour les deux derniers panneaux, l’artiste avait fait une légère entorse à la commande en proposant des poissons et des oiseaux - évoquant il est vrai le contexte aquatique et bucolique de l'environnement exceptionnel du lycée. Ces œuvres avaient été qualifiées de « charmantes » par la commission d’agrément de 1956.

 

-          Le décor du vestibule sur cour, composé de trois panneaux, est dû à Jacques Despierre. On y retrouve une composition cubiste proche de la tapisserie contemporaine (Lurçat) avec les grands thèmes prisés de l’artiste : le cheval, la nature et l’homme. Dans le grand panneau des sciences naturelles ou exactes, organisé de manière symétrique, il utilise plusieurs motifs empruntés à des œuvres précédentes, tels le nu, proche de ceux figurant sur un paravent peint en 1937 ou le coléoptère utilisé dans la série de tapisseries des Gobelins, les Quatre Saisons. Dans un dessin dynamique et géométrique, aux arêtes anguleuses, Despierre évoque les expériences de chimie, de physique et de génétique enseignées aux élèves. L’iconographie des deux autres panneaux est plus classique : livres, plume et encrier, machine à écrire illustrent l’écriture ; violon et violoncelle, palette, nature morte, buste, éléments d’architecture renvoient aux principaux enseignements des beaux-arts (la musique, la peinture, la sculpture et l’architecture).

 4/ 1954-1957 : le décor du réfectoire (bâtiment C)

Ensemble de six peintures, inscrites MH (2008)

En 1954, un ensemble de six peintures sur toile marouflée est commandé pour orner les salles à manger des élèves et la salle des maîtres. Sur le sujet proposé, « scènes récréatives », six artistes donnent libre cours à leur créativité sur de grands panneaux de 4, 35 mètres sur 2, 2 mètres : Louis Berthommé Saint-André, Yves Brayer, Roger Chapelain-Midy, Jacques Despierre, André Planson et Emile Sabouraud.

- Le Couronnement du printemps (Louis Berthommé Saint-André)

Au centre se trouve le printemps, symbolisé par un personnage masculin tenant un nid avec des œufs, qui est couronné par une femme à la grande écharpe bleue. A droite, un groupe de trois femmes, la plus proche, les pieds dans une rivière empoissonnée, tient le personnage, une autre tient un couple d'oiseaux et la dernière un bouquet de lilas. A gauche, séparés de la scène centrale par un arbre où se tient une pie, un groupe de jeunes femmes et un jeune homme.

Louis Berthommé Saint-André (1905-1977) est un peintre réputé pour ses paysages et son goût pour la représentation de la femme ainsi que pour ses portraits. Formé à l’Ecole des Beaux-Arts et aux Arts décoratifs, il mène une carrière officielle au ministère de la Guerre. Sa production de décorations murales est abondante et il participe à l’élaboration de plusieurs projets liés au 1% artistique. Son œuvre est aujourd’hui présente dans de nombreux musées, dont le Musée national d’Art moderne et le Musée d’art moderne de la Ville de Paris.

- Orphée (André Planson)

Au centre, un paysage de lac miroitant est survolé par un couple ailé symbolisant l'amour. A droite, Orphée joue de la lyre, accompagné d'un couple d'oiseaux dans un parc orné d'une statue ailée de l'amour tenant son arc et animé par des danseurs. A gauche, un paysage avec couple de biche et cerf dans des rochers, un couple de jeunes gens et un personnage vêtu à l'antique.

André Planson (1898-1981) appartient au groupe de la « Réalité poétique » et Marc Orlan dira de lui qu’il « sait le langage des eaux et celui des bois ». A la fois héritier de l’impressionnisme et des traditions classiques, il se rattache aussi au courant des « peintres du bonheur ». Professeur à l’Académie Julian, il est l’auteur de nombreux décors muraux de paquebots, de théâtres, de tapisseries et d’illustrations. En 1960, il est élu membre de l’Académie des beaux-arts. Parmi ses décors majeurs figure, en 1937, celui du Palais de Chaillot. Dans le choix du thème d’Orphée, il exprime son goût pour les figures et les paysages, illustrant deux de ses sujets favoris, l’amour et la nature.

- Les Jeux d’eau (Jacques Despierre)

Ce panneau exécuté par Jacques Despierre (1912-1995) évoque les loisirs nautiques du lac d’Enghien-les-Bains : baignade, pêche, promenade en barque, aviron sont pratiqués par de jeunes gens – il était affecté au réfectoire de garçons.

Le peintre se situe dans la tradition française de la « reconstruction réaliste », utilisant des procédés dérivés du cubisme avec un goût prononcé pour la structure architecturale. Son œuvre, abondante et variée (décor mural, tapisserie, art de la médaille, illustration, vitrail) lui vaut en 1969 son entrée à l’Académie des beaux-arts. Dès 1948, il est professeur aux Arts décoratifs, où il devient, en 1962, chef de la section atelier mural. Qualifié aujourd’hui de « figure emblématique de l’art pictural de la deuxième moitié du XXe siècle », il a également été le décorateur de nombreux paquebots transatlantiques dont le France.

- Un dimanche en Camargue (Yves Brayer)

Deux arlésiennes au premier plan, l'une avec une ombrelle et l'autre avec un éventail, se détachent sur un paysage camarguais avec une maison traditionnelle et des chevaux en liberté.

Cette œuvre se situait dans la salle à manger des professeurs.

Yves Brayer (1907-1990) fait partie des peintres français du XXe siècle qui restent fidèles à la tradition figurative tout en imposant leur vision personnelle. Prix de Rome en 1930, il enseigne à l’atelier parisien de la Grande Chaumière à la fin des années 1940. Son premier grand décor mural pour la façade du pavillon du thermalisme de l’Exposition internationale de 1937 lui ouvre une carrière de décorateur, notamment à l’Opéra de Paris. Son style change durant les années 1950, date de la commande du 1% artistique du lycée d’Enghien, où il évoque les paysages de la Camargue qu’il affectionne tout particulièrement.

- Jeux d’enfants (Roger Chapelain-Midy)

Dans un paysage de parc de château avec une statue en buste au milieu d’un parterre, évoluent plusieurs fillettes. Au premier plan, une table est ornée d'un bouquet de tulipes blanches et d'un couple de pigeons blancs.

Roger Chapelain-Midy (1904-1992) est un ardent défenseur de la tradition classique. Amateur de Poussin et à l’écart des courants contemporains, il ignore délibérément le cubisme, le fauvisme et toutes les conquêtes formelles de la première moitié du XXe siècle. Il est qualifié de « peintre de la vie silencieuse » et de « poétique surréaliste ». Grand décorateur de théâtre, il est aussi l’auteur de décors de paquebots et de nombreuses peintures murales dont celles du Théâtre national de Chaillot et de l’Institut agronomique de Paris.

 - Les plaisirs nautiques (Emile Sabouraud)

La toile de Sabouraud est encore une évocation du lac et des plaisirs de l'eau dans le cadre d'une fête nationale - les bords de l'eau et les maisons du fond étant pavoisées.

Emile Sabouraud (1900-1996), élève d’Othon Friesz à l’Académie de la Grande Chaumière, remporte en 1935 le prix Abd-el-Tif, permettant à de jeunes artistes talentueux de séjourner aux frais de l’Etat à « la villa Médicis d’Alger ». A son retour en France, il rejoint le groupe de la « Réalité poétique » aux côtés d’André Planson. Attaché à la couleur, il demeure toute sa carrière épris d’un certain fauvisme riche de matière, où le travail d’empâtements le dispute à des figures géométriques soulignées de noir.

5/ 1963 : un complément pour le centre d’apprentissage : le lac d’Enghien (Louis Berthommé Saint-André)

Lors de la commission du 15 octobre 1963, Louis Berthommé St André est choisi pour exécuter une peinture sur toile marouflée de 3m x 3,90 mètres environ pour le hall d’entrée du centre d’apprentissage. Elle représente une régate de voiles sur le lac d’Enghien, avec le casino en arrière-plan. 

Inscrivant ainsi l’établissement dans son site et dans la vie contemporaine, cette œuvre rejoint la tradition des décors des lycées des années trente (comme celui du vestibule d’Hélène Boucher).

MODIFICATIONS ULTERIEURES

D’octobre 1989 à décembre 1990, le centre d’apprentissage a fait l’objet d’une restructuration-extension, réalisée par un trio d’architectes installés à Paris, Thierry Bresdin, Benoît Jacquard et Victoria Pignot. Il s’agit du premier chantier de cette jeune agence qui partage « un amour commun de la rationalité et des belles mises en œuvre »[10].

Leur tâche a consisté à adjoindre de nouveaux locaux aux ateliers existants et à conduire – en collaboration avec le paysagiste Jean-Marc l’Anton - un travail paysager permettant de relier visuellement le centre d’apprentissage au lycée, situé de l’autre côté de l’avenue de la Ceinture.

La densité de ce programme et l’exiguïté du terrain les ont incité à développer au maximum l’efficacité du plan. Ils ont élevé à l’arrière des ateliers un corps central prolongeant leur emprise, entouré par trois pavillons plus bas, marquant une habile transition avec le tissu résidentiel environnant. Cette composition a généré deux patios, apportant une abondante lumière naturelle aux salles de classes.

Un matériau s’est imposé pour « fondre » au mieux cette extension dans l’existant : une brique blanche silico-calcaire, pérenne et claire, reprenant l’échelle du parement de terre cuite du lycée. Son emploi alterne avec des murs-rideaux aluminium.

Très réussie, car jouant des codes du bâti d’origine, cette extension a reçu le prix de la Première Œuvre du Moniteur (décerné par le magazine éponyme) en 1991.

De 1992 à 1994, la même équipe a restructuré le bâtiment A des classes spécialisées : remise aux normes pédagogiques et de sécurité des salles de chimie, physique et sciences naturelles, réaménagement de la salle des professeurs et création d’un CDI au rez-de-chaussée.

Le bâtiment C (réfectoire et logements) a été réhabilité en 2008 par l’agence d’architecture Bret et Trividic[11].

Depuis 2013, une nouvelle campagne de restructuration de l’ouest du site est à l’œuvre, dans le cadre d’une démarche HQE : elle vise à atténuer la perception du centre d’apprentissage et du lycée comme deux entités distinctes. Le concours pour cette opération a été remporté par le cabinet d’architectes Denu et Parandon[12].

 

 

[1] Archives nationales, AJ 16 8580, rapport de l’Inspecteur général de l’Instruction Publique chargé des constructions du Second Degré, R. Plande, le 17 février 1957, sur le lycée d’Enghien-les-Bains (Seine-et-Oise).   

[2] Archives nationales, 1978 0614 393-394, Seine-et-Oise, Enghien-les-Bains, annexe du lycée Claude Bernard, dossier relatif à la construction du gymnase (1955).

[3] « Lycée mixte d’Enghien – Georges Martin architecte », L’Architecture française, Constructions scolaires II, n° 179-180, 1957, p. 114.

[4] Archives nationales, 1978 0614 477-478, Seine-et-Oise, Enghien-les-Bains, annexe du lycée Claude Bernard, dossier relatif à la construction du centre d’apprentissage Saint-Gratien, devis descriptif des travaux de tous corps d’état, 1957, p. 4.

[5] Ibid.

[6] Archives nationales, Délégation aux arts plastiques ; Sous-direction de la décentralisation et du soutien à la création artistique ; Bureau de la commande artistique ; 1 %. 19880466 /20. Seine-et-Oise, Enghien-les-Bains, lycée mixte, programme de décoration au titre du 1% artistique, commissions des 23 janvier 1952, 22 octobre 1954 et 28 juin 1956.

[7] Archives nationales, Délégation aux arts plastiques ; Sous-direction de la décentralisation et du soutien à la création artistique ; Bureau de la commande artistique ; 1 %. 19880466 /20. Seine-et-Oise, Enghien-les-Bains, centre d’apprentissage Saint-Gratien, programme de décoration au titre du 1% artistique, commission du 12 mai 1954. 

[8] Archives nationales, Délégation aux arts plastiques ; Sous-direction de la décentralisation et du soutien à la création artistique ; Bureau de la commande artistique ; 1 %. 19880466 /40. Seine-et-Oise, Enghien-les-Bains, centre d’apprentissage Saint-Gratien, programme de décoration au titre du 1% artistique, commission du 15 octobre 1963.

[9] CUEILLE, Sophie, Enghien-les-Bains, architecture et décors, Inventaire général du patrimoine culturel / Région Île-de-France, collection Images du Patrimoine n° 255, Paris, Somogy, 2009, pp. 162-171.

 [10] « Fin de chantier – Enghien-les-Bains, lycée professionnel », AMC, n° 23, juillet-août 1991, pp. 10-11.

[11] Archives régionales, 3 W 24, Enghien-les-Bains (Val-d’Oise), opération de restructuration du bâtiment du service de restauration et de logements du lycée Gustave Monod (2008). 

[12] Archives régionales, 4130 W 14, Enghien-les-Bains (Val-d’Oise), restructuration du site ouest du lycée Gustave Monod, jury de sélection des cinq candidats amenés à concourir, le 9 octobre 2013.

  • Murs
    • brique
    • béton
  • Toits
    ardoise
  • Plans
    plan rectangulaire régulier
  • Étages
    2 étages carrés
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • Couvertures
    • toit à longs pans
    • shed
    • croupe
  • Escaliers
    • escalier dans-oeuvre : escalier tournant à retours avec jour en maçonnerie
  • Techniques
    • peinture
    • sculpture
  • Statut de la propriété
    propriété de la région
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Sites de protection
    zone de protection du patrimoine architectural urbain et paysager
  • Précisions sur la protection

    Label Architecture contemporaine remarquable (ACR) décerné en 2020.

Annexes

  • SOURCES
Date(s) d'enquête : 2006; Date(s) de rédaction : 2022
(c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel
Cueille Sophie
Cueille Sophie

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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Philippe Emmanuelle
Philippe Emmanuelle

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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