Dossier collectif IA75001077 | Réalisé par
Philippe Emmanuelle (Rédacteur)
Philippe Emmanuelle

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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Mercier Marianne (Rédacteur)
Mercier Marianne

Chargée du recensement et de la protection au titre des Monuments historiques

Correspondante du label "Architecture contemporaine remarquable"

Conservation régionale des monuments historiques, DRAC Ile-de-France

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  • enquête thématique régionale
Les lycées parisiens de Jean-Claude Dondel et Roger Dhuit
Auteur
Copyright
  • (c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel

Dossier non géolocalisé

  • Dénominations
    lycée
  • Aires d'études
    Ile-de-France
  • Adresse
    • Commune : Paris
      Adresse : 89 cours , de Vincennes , 38 boulevard, Soult , 81 avenue de Choisy
      Cadastre : 2020 EC 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9 Lycée Maurice-Ravel : 2020 section EC parcelles 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9  ; 2020 AO 3, 4 Lycée Paul-Valéry : 2020 section AO parcelles 3, 4 ; 2020 DU 9 Lycée Gabriel-Fauré : 2020 section DU parcelle 9

Jean-Claude Dondel et Roger Dhuit : un duo hors pair dans le paysage scolaire parisien

Formés à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris et architectes en chef des bâtiments civils et palais nationaux, Jean-Claude Dondel (1904-1989) et Roger Dhuit (1910- ?) ouvrent en 1955 une agence au 44, boulevard Soult, dans le douzième arrondissement. Leur association marque le début d’une fructueuse carrière dans le domaine des établissements scolaires et des équipements sportifs. Véritables spécialistes des CES et CEG, dont ils fournissent à la fin des années 1960 une quinzaine de prototypes dans toute la France, ils construisent aussi quatre lycées : l’un en Isère (à Voiron – 1954-1963) et surtout trois dans la capitale entre 1955 et 1963. Jean-Claude Dondel restaure, en outre, le lycée Carnot (Paris, 17e arrondissement). Avec Roger Dhuit, il conçoit aussi le centre d'apprentissage du bâtiment de Brest-le Bouguen (1959-1965) et l'école normale supérieure de jeunes filles de Montrouge (1963). Enfin, les deux hommes dressent les plans de cités scolaires, à Annonay (Ardèche), Charleville-Mézières (Ardennes) ou encore Evry (Essonne) [1].

Le premier lycée qu'ils édifient, entre 1955 et 1962, est le lycée Maurice Ravel (20e arrondissement). Cette annexe du lycée Hélène Boucher, bâtie sur une parcelle mitoyenne, est d’abord confiée à Roger Dhuit avant qu’en 1957, le ministère de l’Education nationale nomme également Jean-Claude Dondel et valide les plans de cet établissement de jeunes filles, destiné à 1200 élèves dont 100 internes et 700 demi-pensionnaires.

 Alors que le chantier du lycée Maurice Ravel est toujours en cours, les deux architectes sont amenés à réaliser un second établissement, dans le 13ème arrondissement cette fois. Erigé entre 1957 et 1964 sur l'emplacement d'une ancienne usine de la porte de Choisy, le lycée Gabriel Fauré est prévu pour 1050 garçons dont 750 demi-pensionnaires mais il accueille dès son inauguration une population mixte.

Enfin, Dondel et Dhuit élaborent entre 1958 et 1963 le lycée Paul Valéry (12e arrondissement). Construite en seulement neuf mois[2], cette annexe mixte du lycée Jean-Baptiste Say est conçue pour recevoir entre 2600 et 3000 élèves dont 1600 pensionnaires. Situé sur une immense portion des anciennes fortifications, son terrain permet aux deux architectes de se livrer à un savant travail de composition, résultant de la combinaison d’une longue barre d’externat, évidée en son centre par un préau et de pavillons aux formes plus libres comme celui de l’administration, légèrement arrondi. La trame est magnifiée par les verticales noires des potelets en béton armé qui forment l’ossature des bâtiments. Ouvert sur la verdure et les aménagements paysagers, l’établissement est reconnu à sa réception comme le plus moderne de Paris. Sa qualité tient aussi, paradoxalement, aux grands espaces vides laissés entre les pavillons, où « les élèves sont invités à déambuler et à s’approprier […] cours et terrains de sport »[3].

La présence du 1% artistique est particulièrement importante dans les établissements scolaires érigés par le duo Dondel-Dhuit. Jean-Claude Dondel y est très attaché. Il met en effet un point d’honneur à faire participer les artistes dès l’état de projet. Il s’agit d’intégrer étroitement l’œuvre plastique dans l’œuvre architecturale, de sorte que l’ensemble ne fasse qu’un. C’est d’ailleurs ce qu’exprime le proviseur du lycée Paul-Valéry en 1966 : « l'idée n'était pas de planter n'importe quelle œuvre d'art sur n'importe quel mur, mais de créer une atmosphère d'art et de liberté »[4]. Chaque établissement se voit doté de plusieurs œuvres :  mosaïques à l’entrée du lycée Maurice Ravel, mosaïque et sculpture pour le lycée Gabriel Fauré, ou encore tapisserie, panneaux de vitraux et sculpture pour le lycée Paul Valéry.

En 1962, Dondel et Dhuit participent conjointement au grand concours « conception-construction » lancé par le Ministère de l’Éducation nationale[5] mais n’obtiennent qu’un succès en demi-teinte. En effet, s’ils ne remportent pas le concours, ils formulent plusieurs idées jugées pertinentes, comme l’inclusion d’une piscine pour la pratique sportive au sein même d’un établissement[6]. En 1966, les deux hommes mettent fin à leur collaboration.

[1] CARRE, Anaïs, « Des archives de Jean-Claude Dondel aux archives de l’administration : des sources qui renseignent sur les collaborations entre architectes et artistes », In Situ [En ligne], 32 | 2017, mis en ligne le 27 juillet 2017, consulté le 01 août 2022. URL : http://journals.openedition.org/insitu/14639 ; DOI : https://doi.org/10.4000/insitu.14639.

[2] « Lycée mixte boulevard Soult à Paris », L’Architecture Française, n° 221- 222, 1961, p. 108.

 « Un ensemble boulevard Soult à Paris », Techniques et architecture, n°2, février 1963, p. 1-3.

[3] CARRE, Anaïs, Jean-Claude Dondel (1904-1989), architecte scolaire : l’exemple de trois lycées parisiens, Mémoire de recherche en master 1 « Métiers des archives », sous la direction de Marie-Cécile Bouju, Université Paris 8, 2015, vol. 1, p. 72.

[4] PSICHARI, Henriette, « L'Art vivant dans les lycées », L'Education Nationale, n° 797, 1966, p. 20-23.

[5] Techniques et architecture, n° spécial concours « conception-construction du ministère de l'Education nationale », janvier 1964.

[6] Cité de l’Architecture et du Patrimoine, centre d'archives d'architecture du XXe siècle, fonds Jean-Claude Dondel – 074 IFA.

Le lycée Maurice-Ravel (89 cours de Vincennes, Paris 20e)

"En 1955, Roger Dhuit reçoit commande de la D.E.S.U.S pour la construction d'une annexe du lycée Hélène-Boucher, situé cours de Vincennes à Paris. Cet établissement, construit par Lucien Sallez (1968-1963) sur un modèle proche de celui du lycée Camille-Sée, est bâti sur un terrain de près de 4000 m², situé directement sur la rue. Constitué selon un plan en fer à cheval et reconnu aujourd'hui comme un modèle de l'architecture scolaire des années 1930, il reçoit une population d'élèves exclusivement féminines. Le terrain destiné à accueillir l'annexe est quant à lui immédiatement voisin. Implanté à l'extrémité du cours de Vincennes, à la frontière entre le 12ème et le 20ème arrondissement. Il est délimité par quatre rues : le cours de Vincennes au sud, la rue de Lagny au Nord, la rue des Maraîchers à l'Ouest et, à l'Est, une rue en cours d'exécution au moment de l'appropriation du terrain par l’État. Au moment de la commande, cet espace est occupé par des hangars. Roger Dhuit est d'abord amené à aménager des classes provisoires en préfabriqués afin de désengorger le collège Sophie Germain. Le projet poursuit son cours jusqu'en 1957, lorsque l'administration nomme également Jean-Claude Dondel, qui depuis 1955 codirige une agence avec Roger Dhuit. Les deux architectes travaillent dorénavant ensemble sur le projet d'annexe, destinée à recevoir 1200 élèves filles, 1100 externes et 100 étudiantes venant d'établissements extérieurs. Comme le lycée Hélène-Boucher, son annexe est établie en bordure du cours de Vincennes, juxtaposée à un immeuble situé à l'angle de la rue des Maraîchers et du cours de Vincennes. Cette première partie du bâtiment est composée en R+1. En sous-sol de ce premier établissement, sur un tiers de la construction, les architectes ont disposé un vide sanitaire et une galerie nécessaire au passage des canalisations diverses. Au rez-de-chaussée, les élèves entrent par la porte principale, située sur la gauche et se retrouvent dans un hall d'entrée assez vaste, menant à l'établissement situé à l'arrière de ce bâtiment sur rue. Sur la droite, on trouve la loge du concierge, les bureaux, la salle des professeurs et enfin la bibliothèque. De la loge du gardien, un escalier donne directement accès à son logement situé au premier étage, tandis qu'un autre escalier part du couloir du rez-de-chaussée pour se rendre dans les bureaux de la directrice pédagogique et du censeur, également situés au premier étage. L'établissement recevant les classes du lycée se trouve situé sur la rue des Maraîchers. Une nouvelle fois en bordure de voie, le bâtiment est inséré entre deux immeubles existants. Cet élément architectural de l'établissement est construit en R+4. Comme pour le premier bâtiment, les architectes ont placé, sous l’ensemble de celui-ci, en sous-sol, un vide-sanitaire composé d'une grande galerie. Au rez-de-chaussée, Jean-Claude Dondel et Roger Dhuit disposent des salles de jeux, d'études et de permanences, ainsi que des bibliothèques. Enfin, un bloc sanitaire, accessible de la cour, vient compléter l'ensemble des espaces fonctionnels de cet étage, liés entre eux par un grand couloir. Afin que les élèves et les professeurs accèdent aux étages sans engorgement, les architectes ont placé trois escaliers : deux sur les extrémités et un central qui s'arrête au troisième étage. Le troisième étage est composé des classes d'enseignement général et d'un bloc sanitaire, tandis que le quatrième abrite les classes scientifiques et un bloc sanitaire. L'établissement compte également un bâtiment d'enseignement technique, construit perpendiculairement à celui de l'enseignement général. Une fois de plus, celui-ci est construit en mitoyenneté avec l'immeuble voisin. Les architectes l'ont élevé en R+3. Le sous-sol accueille la chaufferie, qui, à la construction, était une cuve à charbon, deux ateliers d'entretien et un garage. Aussi, les architectes y ont placé un couloir de circulation ainsi qu’un groupe de salle d'eau et W.C, réservé au personnel. Un escalier monte de ce sous-sol aux trois étages. Le hall d'entrée, situé au rez-de-chaussée, est accompagné de trois classes d'enseignement ménager, alors au programme de l'enseignement des jeunes filles à cette époque, et d'un bloc sanitaire. Le premier étage est quasiment similaire au rez-de-chaussée puisqu'il est composé de quatre classes destinées à ces mêmes cours et d'un bloc sanitaire. Au deuxième étage, se trouvent trois classes d'enseignement commercial, un petit bureau de surveillante et un bloc sanitaire. Enfin, le troisième étage est composé de trois classes, d'un local de dépôt et d'un bloc sanitaire. Le bâtiment est en communication avec celui de l'Internat. Ce dernier est également en bordure de voie. C'est le bâtiment le plus haut de l'établissement. Au rez-de-chaussée, comme dans de nombreux établissements à cette époque et en rappel des lycées du XIXème siècle, la première pièce est un parloir, destiné aux discussions entre les jeunes pensionnaires et leurs familles quand celles-ci viennent leur rendre visite. À droite, les architectes ont placé une infirmerie avec sa salle d'examen, son cabinet et ses chambres d'isolements. On trouve également l'appartement de l'infirmière, quelques chambres pour les assistantes étrangères et un bloc sanitaire. Contrairement aux autres bâtiments, celui-ci est directement ouvert sur la rue de Lagny avec une entrée particulière afin de permettre aux jeunes femmes de sortir librement sans être contraintes de passer par l'établissement, ce qui aurait pu poser des problèmes de sécurité. Aux trois premiers étages, de part et d'autre d'un couloir central, se trouvent trois séries de chambres. Aussi, au premier étage, les étudiantes trouvent un second foyer, tandis qu'aux deuxième et troisième étages, cet espace est occupé par des salles d'études. Les quatrième et cinquième étages accueillent des salles d'études et des petits appartements pour les surveillantes générales. Les membres de l'administration ont leur appartement au sixième étage. Ces logements sont présentés sur les plans comme « deux grands appartements et une chambre pour célibataire ». Au septième étage, ce sont des appartements signifiés pour « agents mariés » et une crèche destinée à leurs enfants, que les architectes ont imaginé. Enfin, l'établissement possède son propre gymnase, également situé en bordure de la rue de Lagny. Il est composé de deux salles superposées. Des salles de matériel, des vestiaires, toilettes et douches viennent compléter l'ensemble. On atteint le deuxième étage par un escalier.

L'ensemble de cet établissement est construit en béton armé dont certains éléments, comme les escaliers, sont préfabriqués. Ce n'est qu'en 1960 qu'est posée la question d'un aménagement de cuisine et en 1972, le projet d'un aménagement d'un self-service. Comme l'indiquent les plans, ce second projet est suivi par Roger Dhuit qui fera aménager, en même temps que ce self-service, un monte-charge.

En ce qui concerne les 1% décoratifs, les archives font état d'une collaboration avec le sculpteur Paul Belmondo, le céramiste Barta et le peintre Rohner. Ce dernier intervient dans de nombreux établissements scolaires construits par Jean-Claude Dondel et Roger Dhuit dont, notamment, les lycées Paul-Valéry et Gabriel Fauré. Pendant de nombreuses années, il a été question que l’État achète le bâtiment situé sur le cours de Vincennes et auquel le lycée est mitoyen, afin d'agrandir l'établissement scolaire. Ce petit immeuble a longtemps posé problème puisqu'il logeait un café dont la présence était jugé absolument contraire au principe d'éducation par les parents d'élèves. Ceux-ci avaient peur de voir leurs filles être détournées de leurs études par de mauvaises mœurs.

L'établissement s'est ouvert assez rapidement à l'accueil de garçons, avec la mise en place de la mixité dans les lycées (officiellement dès 1957). De par son importante capacité d'accueil, il est devenu administrativement une cité scolaire, accueillant mille huit cents collégiens et lycéens. Le bâtiment technique ainsi que les salles de jeux de la structure d'enseignement général ont été modifiés pour recevoir des salles de classes, tandis que celui de l'internat accueille toujours, aujourd'hui, des étudiants suivant leur scolarité au sein du lycée Maurice Ravel, mais aussi de jeunes élèves d'autres établissements parisiens".

[Description tirée du mémoire d'Anaïs Carré : CARRE, Anaïs, Jean-Claude Dondel (1904-1989), architecte scolaire : l’exemple de trois lycées parisiens, Mémoire de recherche en master 1 « Métiers des archives », sous la direction de Marie-Cécile Bouju, Université Paris 8, 2015, vol. 2, p. 27-29].

Le lycée Paul-Valéry (38 boulevard Soult, Paris 12e)

"Dans les années qui suivirent la Seconde Guerre Mondiale, Paris est un chantier considérable. La ville est en pleine évolution et ce sont des quartiers entiers qui sortent de terres, aux emplacements des anciennes portes de la ville. Le Boulevard Soult, situé à l’endroit où se trouvaient les anciennes fortifications de Paris, fait partie de ces espaces urbains en pleine mutation. Des ensembles de logements sont construits à proximité et, par conséquent, la population s'y déploie. Afin d'accompagner l'installation de ces nouvelles familles, l’État essaie de subvenir aux besoins que cela implique et cela notamment par la construction d'établissements scolaires en mesure d'accueillir les enfants de toutes âges. C'est au numéro 38 du Boulevard Soult, sur un terrain de près de trois hectares qu'est envisagé, par la DESUS, la construction de l'annexe du Lycée Jean-Baptiste de Say. D'après le programme de construction conservé dans le fonds de la DESUS aux Archives Nationales, l'établissement était destiné à accueillir de 2600 à 3000 élèves. Pour mener à bien sa réalisation, l’Éducation Nationale fait appel au duo d'architectes BCPN : Jean-Claude Dondel et Roger Dhuit. Ces deux architectes avaient déjà travaillé sur le projet du lycée Maurice-Ravel, annexe du lycée Hélène- Boucher. Le 7 janvier 1958, le plan de masse proposé par les architectes reçoit un avis favorable du Conseil Général des Bâtiments de France. Pour autant, le coût du projet étant assez important, l'établissement doit faire l'objet d'une construction par tranche afin d'étaler les dépenses sur plusieurs années. Cette construction par tranche implique la présentation d'un avant-projet qui est soumis à validation afin que les travaux puissent commencer. Ainsi, c'est en date du 6 mai 1958, par la validation de l'avant-projet de Jean-Claude Dondel et Roger Dhuit, qu'est officiellement lancé le chantier du nouveau lycée parisien, dont la première tranche est livrée en 1960.

L'établissement est composé de cinq pavillons distincts les uns des autres. Le premier élément est le bâtiment des cuisines, réfectoires et salles polyvalentes, dont les capacités d'accueil correspondent à la moitié de celles de l'établissement. Composé de deux niveaux construits sur un sous-sol, ce bâtiment est situé sur l'une des extrémités du terrain et est perpendiculaire au boulevard. Le second bâtiment est celui de l'externat et est, par conséquent, le plus important de cette réalisation, puisque c'est dans celui-ci que se déroulent les cours. Il est élevé de quatre niveaux sur vide sanitaire. L'architecte signe ici, grâce aux dimensions du terrain qui le lui permettent, la réalisation d'un bâtiment d'une longueur considérable pour un établissement localisé dans Paris, puisque cette barre ne mesure pas moins de 200 m². Situé devant l'externat, le bâtiment administratif est le deuxième élément important du lycée et la première structure accessible depuis l’entrée de l’établissement, ce qui implique que ce soit sur cette partie que figure la dénomination du lycée, nom qui fut choisi quelques années après sa construction. Édifiés sur un sous-sol, les deux étages de ce pavillon accueillent les bureaux de l'ensemble du personnel administratif du lycée, viennent ensuite le bâtiment des logements et celui des deux gymnases.

L'architecte a opté pour une ossature en béton armé, avec des poteaux bruts de décoffrage en façade. Les pignons et les allègres ont été revêtus en mosaïque de verre. Les façades de l'externat sont représentatives de l'usage de la trame d'un mètre soixante-quinze, présente sur l'ensemble du bâtiment et rendue visible par l'utilisation de petits poteaux en béton armé. Au niveau du rez-de-chaussée, l'emploi de cette trame laisse deux fois place à de larges préaux sur une surface de 33 m. Les architectes ont construit un bâtiment de logements de neuf étages contenant deux appartements par étage après avoir initialement choisi d'édifier un bâtiment de six étages qui a été jugé insuffisant par l'Inspecteur général de l'Enseignement du Second Degré en raison du nombre de membres du personnel que l'immeuble devait accueillir.

Dans le cadre du 1% artistique, Jean-Claude Dondel et Roger Dhuit ont proposé plusieurs artistes. Les œuvres d'art étaient annoncées par les architectes dans le dossier d'avant-projet de la construction :

• Jacques Despierre qui a créé une tapisserie qui était installée dans le vestibule d'attente du bâtiment d'administration. Elle figure le héros de la mythologie antique Prométhée, représenté nu, de dos, entouré de deux éclairs rouges. Il est placé à la charnière entre un monde divisé en deux : l'un grouillant d'animaux marins et l'autre de végétaux.

• Max Ingrand qui a dessiné le paravent en verre coloré situé dans le préau.

• Couturier qui est à l'origine du groupe sculpté en bronze représentant la Famille, situé sur un terre-plein végétalisé à l'entrée du lycée. Plus haute que le bâtiment accueillant les salles de classes, l'œuvre était visible depuis la rue. Représentation triste de la famille, « le groupe père-mère-enfant est émouvant, un peu douloureux, la vie est lourde à ce couple de parents » déclare en 1950 Henriette Psichari dans un article consacré à « L'Art vivant dans les lycées » [1].

À sa réception, l'établissement est jugé comme le « plus moderne de Paris » mais les œuvres d'art qu'il renferme ne sont pas au goût de tous. Le groupe de bronze de Couturier, fait l'objet d'un article particulièrement acerbe. Quoique nommé comme chef-d'œuvre, ce qui est plutôt positif, il est ensuite qualifié de « loupé » et l'auteur de l'article demande que les autorités « [contraignent] de le « reprendre » et de le soustraire à la vue du public ». Sans que l'on sache si cet article a influencé les décisions qui ont été prises, l’œuvre a été enlevée et a longtemps été conservée dans les caves de l'établissement. Bien que certains, dont Jean-Claude Dondel, ont espéré que l’œuvre reprenne sa place quelques années après son retrait, ceci ne se produit pas [2]. Le lycée a également perdu le panneau de verre du préau, qui a été enlevé pour des raisons de sécurité.

Les gymnases, quant à eux, ne font plus partie intégrante de l'établissement. En effet, pour satisfaire la demande en matière de structure sportive dans le secteur, ils sont devenus des équipements dépendants de la ville de Paris. Comme les lycées Maurice- Ravel et Gabriel-Fauré, l'établissement accueille des collégiens, des lycées et des élèves en classe préparatoire aux grandes écoles. Il est donc considéré, d'un point de vue administratif, comme une cité scolaire".

Un projet de restructuration, destiné à améliorer la séparation fonctionnelle entre les classes de collège et celles du lycée, a été à l'étude entre 2016 et 2017 ; il a été abandonné.

[Description tirée du mémoire d'Anaïs Carré : CARRE, Anaïs, Jean-Claude Dondel (1904-1989), architecte scolaire : l’exemple de trois lycées parisiens, Mémoire de recherche en master 1 « Métiers des archives », sous la direction de Marie-Cécile Bouju, Université Paris 8, 2015, vol. 2, p. 31-32].

[1] PSICHARI, Henriette, « L'Art vivant dans les lycées », L'Education Nationale, n° 797, 1966, p. 20-23.

[2] AU sujet de la place accordée par Dondel au 1% artistique dans les établissements scolaires relevant de sa conception, voir : CARRE-RICHER Anaïs, « Discussion sur la place du 1 % dans les lycées d’enseignement général (Paris, 1950-1983) », dans Éléonore Marantz (dir.), L’atelier de la recherche. Annales d’histoire de l’architecture #2016# : L’architecture en discours, actes de la journée des jeunes chercheurs en histoire de l’architecture du 29 septembre 2016, Paris, site de l’HiCSA, mis en ligne en mars 2019, p. 78-92.

Le lycée Gabriel-Fauré (81 avenue de Choisy, Paris 13e)

Le 13ème arrondissement est, dans les années 1950-1970, en plein aménagement urbanistique. L’État, qui recherche alors des terrains pour la construction de nouveaux établissements scolaires, se porte acquéreur de l'emplacement de la chocolaterie Lombart qui venait d'être détruite. Il est rapidement décidé que ce terrain recevra un lycée pour garçon puisque le 13ème arrondissement est déjà doté, par le lycée Claude Monet, d'un lycée pour jeunes filles. C'est en sa qualité d'Architecte en Chef des Bâtiments Civils et Palais Nationaux que Jean-Claude Dondel reçoit commande pour la réalisation de ce bâtiment qu'il construit avec Roger Dhuit, son associé. Les premiers plans sont vus et approuvés par « exploitation de l’arrêté du Ministre de l’Éducation Nationale du 15 mars 1961 » par le recteur de l'Académie de Paris qui est alors Jean Sarrailh. Mais quelques temps après, les architectes sont informés d'un changement de nature du bâtiment qui ne doit plus être un lycée pour garçon mais un lycée mixte. La majeure partie des locaux étant valable pour accueillir une population mixte, les architectes n'ont eu à changer que les blocs de sanitaires afin de disposer, à chaque étage, des toilettes pour filles et d'autres pour garçons.

Les architectes proposent, en juin 1963, un récapitulatif des différents locaux composant l'établissement qu'ils ont réalisé « d'après programme pédagogique en date du 20 février 1957 et plans d'exécution ». Ce récapitulatif montre que les deux architectes élaborent le lycée sur le modèle de Maurice Ravel. Les bâtiments sont disposés autour de la cour centrale où sont réunis la cour de récréation et le plateau de sport. L'entrée du bâtiment, située sur l'avenue de Choisy, est matérialisée par un petit bâtiment ne comprenant qu'un rez-de-chaussée, dont la fonction n'est autre que celle de hall d'entrée et d'accueil. Il donne accès à l'externat, à la cour de récréation et au bâtiment administration-logements. Les architectes ont recouvert ce bâtiment, fait de béton armé, par des panneaux de mosaïque orange afin de bien signaler le caractère de cette partie de l'établissement. Juxtaposé à ce premier bâtiment, a été réalisé le premier externat de l'établissement qui en compte deux. Le premier bâtiment est construit sur quatre étages avec sous-sol. Ce dernier est réservé aux locaux techniques dont la chaufferie, fonctionnant au mazout et au charbon, et un grand dépôt. Au-dessus, au rez-de-chaussée, Jean-Claude Dondel et Roger Dhuit ont disposé une permanence, une bibliothèque, un secrétariat et une salle de documentation pédagogique, une salle de professeur, un bureau de surveillant général, le service médical, composé d'une salle d'attente, du bureau du docteur, de quatre cabines, d'une tisanerie et de trois petites cellules de repos. Enfin, une classe vient compléter l'équipement de cet étage. Au premier étage, sont situées neuf classes dites « normales » en opposition avec les deux salles d'histoire-géographie également établies à ce niveau. La dispense de cours d'histoire-géographie sur ce même palier implique la présence d'une salle des cartes. L'étage compte également une pièce de dépôt pour l'entretien. Le second étage est principalement dirigé dans l'accueil des salles spécialisées. Il compte donc deux salles de dessin, une pièce destiné au dépôt de ces dessins, deux classes de TP de sciences naturelles, deux salles pour recueillir les TP, deux classes pour les cours de sciences naturelles, un atelier, un laboratoire et une salle de dépôt du matériel. Au troisième étage sont situées les classes pour les cours de physique/chimie. Sont dénombrées deux classes de TP de cours de physique, une grande classe de physique, une salle de collection de physique, une classe de TP de cours de chimie, une salle pour la conservation des produits chimiques, une grande classe destinée au cours de chimie. La pratique de la photographie étant au programme dans les années 1950/1960, le programme pédagogique proposait la présence2 laboratoire et d'un atelier de photographie. Enfin, l'étage accueille une classe normale. Le second bâtiment de l'externat est construit sur deux étages sur terre-plein avec galerie technique. Ce deuxième bâtiment accueille plus de salles de classes que le précédent. En effet, au rez-de-chaussée, les architectes ont disposé douze classes normales et un bureau de surveillant général ainsi qu'un local d'entretien. Le premier étage accueille cinq classes normales, cinq classes de langues, une classe d'histoire-géographie, deux salles de musique et une classe de dessin industriel. Le troisième bâtiment, qui est le pendant du premier externat, est celui qui accueille le gymnase. Construit sur rez-de-chaussée avec un étage, il est composé d'une galerie technique avec sous-stations de chauffage, soufflage et service d'eau chaude, une salle de 40x20, trois locaux de matériel pour le gymnase, des vestiaires avec douches, d'une salle pour les professeurs, d'une salle de rééducation et de trois dépôts de matériel d'entretien. Le quatrième bâtiment est multifonctionnel. Au sous-sol, les élèves du lycée, en parcours techniques, ont cours dans les trois classes-ateliers qui y étaient installées, ainsi qu'un local réservé au dépôt d'outils pour cet enseignement. Le rez-de-chaussée accueille une cuisine pour la demi-pension de 750 élèves et de nombreux locaux nécessaires à la préparation des repas. Les architectes ont séparé en quatre réfectoires la surface de cantine qu'ils ont précédée de deux salles d'entrée de lavabos-vestiaires. Il y a également un vestiaire pour le personnel, un réfectoire pour les agents et un autre pour les professeurs. Ce bâtiment, après la présentation du récapitulatif, a été légèrement modifié et le logement de trois pièces qui devait y être installé a finalement été conçu de façon à être attenant aux cuisines sans, pour autant, faire partie de ce bâtiment. Il a été construit sur rue de manière à ce que, de l'intérieur de l'établissement, les élèves ne puissent pas avoir connaissance de ce logement. Enfin, celui de l'administration et des logements, situé à la droite de l'entrée de l'établissement est construit sur trois étages carrés sur sous-sol. En sous-sol sont installés les caves des logements de fonction, la sous-station de chauffage et les différents dépôts nécessaires au matériel administratif. Au rez-de-chaussée, se trouve la loge du concierge et son logement, un logement de fonction, trois chambres individuelles, des sanitaires, les bureaux de direction, d'intendance, du censeur, le secrétariat et le local d'archives. Un autre logement de six pièces vient combler cet étage. Au premier étage, se situent un appartement de six pièces, un second de cinq pièces, un logement de quatre pièces. Au deuxième étage, les architectes ont réalisé un appartement de cinq pièces, un de trois et deux comprenant quatre pièces.

En ce qui concerne les procédés architecturaux, ils sont similaires à ceux de Maurice Ravel à l'exception faite que les allèges ont été recouvertes de panneaux préfabriqués de mosaïques bleues en extérieur comme en intérieur. Jean-Claude Dondel a très largement utilisé ce matériau dans ses constructions qu'elles soient scolaires, sportives ou pour des immeubles de logements. Ces panneaux ont été choisis par les architectes pour leur entretien rapide et peu cher. De plus, ils permettent aux façades d’être moins uniformes et ainsi aux établissements d’avoir une apparence moins froide.

Les artistes qui ont participé à ce chantier de construction sont Georges Rohner, artiste peintre et le sculpteur Olivier Descamps. Un arrêté du 9 mai 1961 porte agrément à George Rohner, artiste peintre, pour qu'il réalise une peinture murale, de 10m 85x 5m05 environ, sur la façade est du bâtiment du réfectoire, dont le sujet est une composition à partir d'éléments géométriques. Le prix de ce projet est fixé à trente-deux milles nouveaux francs. Olivier Descamps reçoit, quant à lui, 38 000 nouveaux francs pour la réalisation de sa sculpture en bronze coulé et soudé, montée sur socle en cuivre. Les dimensions sont d'environ 2m50 (de hauts) x 3m50 (de long) x 1m20 (de profondeur). Le sujet représente l'astrologie et la biologie, conformément à la maquette acceptée par la commission des beaux-arts, le 9 mai 1961.

À la rentrée 1964, qui eut lieu le lundi 21 septembre, les élèves du lycée Gabriel-Fauré découvraient leur nouvel établissement. Depuis, les bâtiments n'ont pas vraiment été modifiés et n'ont pas subi de réfection importante. Mais dans les années 2000, les locaux ne sont plus assez importants pour accueillir les élèves dans les meilleures conditions de travail. En 2015, la Région, qui est en charge de l'entretien des lycées depuis la décentralisation (1983), décide que l'établissement fera l'objet d'un vaste chantier de restructuration.

[Description tirée du mémoire d'Anaïs Carré : CARRE, Anaïs, Jean-Claude Dondel (1904-1989), architecte scolaire : l’exemple de trois lycées parisiens, Mémoire de recherche en master 1 « Métiers des archives », sous la direction de Marie-Cécile Bouju, Université Paris 8, 2015, vol. 2, p. 37-39].

  • Typologies
    (3e quart 20e siècle)
  • Toits
    béton en couverture
  • Murs
    • béton béton armé
  • Décompte des œuvres
    • étudiées 3

Annexes

  • SOURCES
Date(s) d'enquête : 2016; Date(s) de rédaction : 2021
(c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel
Philippe Emmanuelle
Philippe Emmanuelle

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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Mercier Marianne
Mercier Marianne

Chargée du recensement et de la protection au titre des Monuments historiques

Correspondante du label "Architecture contemporaine remarquable"

Conservation régionale des monuments historiques, DRAC Ile-de-France

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