En 1929, Léon Eyrolles, le fondateur en 1903 de l’École spéciale des travaux publics, puis en 1925 des éditions éponymes, devient maire de la commune de Cachan nouvellement créée. Il mène une campagne volontariste pour l’équiper de bâtiments publics conçus par la même équipe d’architectes, Jean-Baptiste Mathon, grand prix de Rome, professeur à l’École des beaux-arts, Joannès Chollet et René Chaussat, enseignants de dessin à l’École spéciale. Ils réalisent le groupe scolaire Paul Doumer en 1932 puis, en 1933, l’imposant hôtel de ville dominé par son beffroi.
Les architectes, proches du maire[1] et épris de modernité, proposent un édifice ouvertement inspiré de l’hôtel de ville d’Hilversum aux Pays-Bas – œuvre de l’architecte Dudok[2] – et des théories rationalistes affichant la distinction des différentes fonctions du bâtiment[3]. Ainsi, le corps ouest de l’ensemble, abritant la salle des fêtes, se signale par ses hautes baies verticales, qui confèrent à cette partie une certaine solennité. On accède par une série de portiques ouverts sur le parc Raspail, juchés sur quelques marches, à un vaste vestibule (salle des pas perdus), d’où part en face l’escalier d’honneur éclairé par un ensemble de vitraux de Louis Barillet.
Au premier étage, une galerie offre l’accès à la grande salle des fêtes, utilisée aussi pour les mariages, entièrement lambrissée de panneaux en « chêne naturel verni « chiffonné[4] ». Le lanterneau central, tout en longueur, permet une luminosité diffuse. L’éclairage électrique est bien étudié, « obtenu par des appliques murales composées de verres holophanes maintenus par des cadres de bois et conjuguées avec un éclairage logé en rigole en corniche[5] ». Gustave-Louis Jaulmes[6], qu’Eyrolles appréciait[7], a réalisé l’imposante toile symbolisant Cachan, Le Joyeux Printemps, de l’extrémité nord de la salle. On reconnaît en arrière-plan l’hôtel-de-ville et l’aqueduc identitaires de la ville.
Mieux conservée que d’autres intérieurs de cet hôtel de ville, la salle des fêtes constitue le point d’orgue d’un complexe signant la nouvelle identité moderne de Cachan impulsée par son maire.
[1] RICHARD, Nancy, « Hôtel de ville de Cachan », Le Bâtiment illustré, novembre 1935, n.p. (p. 2).
[2] MASSARY, Xavier de, En Val de Bièvre. Val-de-Marne, Images du patrimoine, APPIF, 2002, p. 70-72.
[3] RICHARD, Nancy, op. cit., n.p. (p. 6-7).
[4] RICHARD, Nancy, op. cit., p. 40.
[5] FAVIER, Jean, « Le nouvel hôtel de ville de Cachan », La Construction moderne, 15 mars 1936, p. 491.
[6] Voir aussi la mairie du 5e et le théâtre national de Chaillot.
[7] Eyrolles a adressé une lettre de recommandation au président du Conseil municipal de Paris. Voir EYROLLES, Léon, Sans titre [correspondance], Paris, 22 mai 1929, in Archives départementales de Paris, fonds de la direction des Beaux-Arts et de l’Architecture, cote VR 561 : « Veuillez me permettre d’appeler votre bienveillante attention sur un grand artiste de mes amis, M. Jaulmes… »