Dossier d’œuvre architecture IA95000400 | Réalisé par
Cueille Sophie
Cueille Sophie

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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  • inventaire topographique
quai, estacade ou jetée des bords du lac
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Enghien-les-Bains
  • Commune Enghien-les-Bains
  • Adresse esplanade Patnôtre-Desnoyer
  • Cadastre non cadastré
  • Dénominations
    quai
  • Appellations
    estacade ou jetée des bords du lac

Jusqu'au début du 20e siècle, les bords de lac situés face au grand établissement thermal n'avaient pas donné lieu à des aménagements particuliers. Bordés de balustres de bois au dessus d'une digue maçonnée durant tout le 19e siècle puis d'une grille de fer au début du 20e siècle. Bordant un trottoir arboré relativement étroit, s'ils offraient un point de vue remarquable aux curistes et habitants de la ville, ils n'ont acquis le statut légitime de quai promenade et toute leur ampleur qu'avec le grand projet lancé par la municipalité en 1910. Un article du Réveil de Seine et Oise de 1908 vante les lieux et la mise en place d'une balustrade nouvelle anticipe cette réalisation en regrettant le manque d'espace réservé aux promeneurs et aux bateau : La construction d'un warf (c'est-à-dire une jetée avec embarcadère) devant le lac ne donnerait pas seulement à Enghien une promenade merveilleuse et ombragée ou la foule trouverait place les jours de fête sur le lac mais elle permettrait encore l'élargissement de la chaussée encombrée. Dans le cahier des charges rédigé en 1910 par l'architecte parisien Louis Olivier cette demande générale est prise en compte. Il propose une estacade de 246 mètres de long organisé en un avant corps central de 20m de large encadré par deux ailes de 10 mètres de large, un embarcadère de 180m de long sur1m50, et elle doit supporter la charge de 800kg au mètre² appuyée sur 33 piles. Les dessins aquarellés qui accompagnent le projet proposent également la reconstruction d'un nouveau pavillon à la place du kiosque chinois et une entrée monumentale vers les jardins du casino. Ce vaste projet de jetée promenade attire plusieurs spécialistes de l'art du béton dont Edmond Coignet, ingénieur constructeur parisien, E. Ferrand et Pradeau concessionnaires du procédé de béton armé Hennebique et Paul Piketty (ingénieur constructeur, 88 quai de la Râpée à Paris), ancien élève de l'école polytechnique de ciment armé, qui emporte le marché. Ce dernier qui a travaillé sur de nombreux chantiers de la ville de Paris, pour le génie militaire et de nombreuses compagnies de chemin de fer y compris le métropolitain, a également à son actif les ouvrages en béton de plusieurs bâtiments prestigieux comme les fondations du clocher de l'église du Sacré Cœur de Montmartre, les tribunes du champ de course de Grand-Camp à Lyon-Villeurbanne, l'appontement du quai Gambetta à Boulogne-sur-Mer ou l'hôtel Meurice à Paris. Outre la qualité de la mise en œuvre pour un ouvrage d'une telle portée et la solidité requise dans l'implantation des piles dans le lac s'ajoute au chantier une autre contrainte, celle de la difficulté à ne pas endommager la couche géologique dans laquelle se forme l'eau sulfureuse si précieuse à la vie de la station, ni rencontrer d'éventuels griffons sulfureux. De grandes précautions et une technique de piliers enchâssés dans des cylindres de béton, déjà utilisée en 1908 pour le casino nouvellement construit en partie sur le lac, est appliquée sous la surveillance d'un ingénieur des mines. De plus la réalisation de ces travaux est règlementée par la Société d'exploitation des eaux d'Enghien concessionnaire des lieux qui ne veut pas perdre ses prérogatives sur le lac. Elle signe un contrat avec la ville où elle interdit d'établir sur la jetée toute boutique, kiosque ou édicule, n'accepte qu'il ne s'y déroule aucun concert de musique ou fête qui pourrait faire concurrence au casino et se réserve de reprendre la jetée à tout moment. Son propos est clair et démontre dans quelque cadre spéculatif exceptionnel se situe la ville d'Enghien à l'instar de nombre de stations qu'elles soient thermales ou balnéaires : supposons [dit la Société] une chose inouïe telle qu'Enghien devienne un Monte-Carlo. A ce moment, c'est une affaire de millions qu'il y aura à traiter ! Nous n'hésiterons pas à rachèter l'estacade pour bâtir par exemple un superbe établissement tout le long du lac, à la place de la jetée du lac (AC O22). La Société exige que la balustrade bordant la jetée soit à claire voie en fer et fonte et s'oppose à toute balustre de pierre qui boucherait la vue, avec, si possible des vases ornementaux ou statues de place en place. Enfin, pour ne pas encaisser la rue et toujours pour profiter de la vue du lac, elle autorise tout au plus la surélévation de deux marches pour la jetée. L'architecte Olivier dessine lui-même le profil de la balustrade et des candélabres qui ornent encore aujourd'hui la promenade. La commande de la ville est exceptionnelle et ce sont les ingénieurs Henri Granon et Henri Roger (120 rue de la gare à Saint Denis) qui fournissent la balustrade de fer forgé haute de un mètre et longue de plus de 243 mètres. Chaque panneau orné d'arabesques évoquant l'art de la ferronnerie de style rocaille, alors en vogue au début du 20e siècle, est encadré par un motif de panneau ou pilastre. L'ensemble est ponctué de 21 candélabres et quatre porte-mats posés sur un socle en roche d'Euville dite de marbrier pour la finesse de son grain. C'est encore l'architecte Olivier qui en a fourni les dessins exécutés par la fonderie du Val d'Osne (Société anonyme des Hauts fourneaux et fonderie du val d'Osne dont le siège social était à Paris au 58 bd Voltaire). Le modèle spécial est fait d'après dessin signé par l'architecte et établi d'après croquis 2265, les frais de modèle restant à la charge du Val d'Osne. Chaque candélabre est en fonte bronzée et surmonté de lanternes choisies dans le catalogue du Val d'Osne mais agrémenté de guirlandes faisant de cet ensemble une véritable pièce unique en matière d'art de la fonte et de la ferronnerie. La nuit, l'estacade était illuminée par les 71 lampes disposées sur les candélabres par la société électrique de Montmorency et 3000 lampes les jours de fête. Enfin, pour parfaire l'aménagement comme promenade, une vingtaine de bancs sont commandés à la société du Val d'Osne.

Cette jetée promenade est toujours en place.

  • Murs
    • béton
    • métal
  • Techniques
    • fonderie
    • ferronnerie
  • Représentations
    • ornement géométrique
    • coquille
  • Précision représentations

    Le style des garde-corps de la jetée et des candélabre est emprunté au vocabulaire de la ferronnerie du 18e siècle.

  • Statut de la propriété
    propriété publique
Date d'enquête 2006 ; Date(s) de rédaction 2010
(c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel
Cueille Sophie
Cueille Sophie

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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