Dossier d’œuvre architecture IA91001003 | Réalisé par
Estignard Marie-laure (Rédacteur)
Estignard Marie-laure

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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Philippe Emmanuelle (Rédacteur)
Philippe Emmanuelle

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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  • enquête thématique départementale, grands ensembles de l'Essonne
cité La Grande Borne
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Stéphane Asseline, Région Ile-de-France

Dossier non géolocalisé

Localisation

En 1961, l'Office public HLM interdépartemental de la région parisienne confie à Émile Aillaud la réalisation d'une cité d'habitat social de plus de 3000 logements sur une vaste parcelle triangulaire de 90 hectares à cheval sur le territoire des communes de Grigny et de Viry-Châtillon. Elle est principalement destinée à reloger les habitants des îlots insalubres du 13e arrondissement de Paris, alors en cours de rénovation et doit prendre place sur d'anciens terrains agricoles, au lieu-dit "La Grande Borne", à proximité de l'autoroute A6. Le permis de construire est délivré le 10 octobre 1967. 3775 logements sortent de terre entre 1967 et 1971: 3479 collectifs HLM (3115 sur Grigny, 364 sur Viry-Châtillon), 206 logements individuels ILN appelés « Patios » et 90 logements pour la cité de transit LOGIREP. Le quartier du Damier, situé au sud-est, en bordure de l'autoroute, est le premier à voir le jour, ses locataires s'installant dès 1969.

Après les opérations de l'Abreuvoir (1956-1958) à Bobigny (93) et des Courtillières (1958-1964) à Pantin (93), Émile Aillaud est confronté à un nouveau défi : une servitude de radiodiffusion interdit en effet d'ériger sur le terrain des immeubles de plus de cinq étages. L'architecte ne peut donc recourir, comme précédemment, à la forme de la tour émergeant au cœur ou en périphérie de barres sinueuses et serpentines. Il choisit donc de jouer sur les typologies, déclinées à l'infini (ensembles orthogonaux, courbes, en arc de cercle délimitant des places, groupes de maisons à patio...) et sur les modes d'implantation (les bâtiments les plus hauts sont regroupés en "bouquets" indépendants servant à la fois d'objets-manifestes mais aussi à délimiter les contours de la cité et à la protéger de la circulation automobile). A partir d'un point d'ancrage, la place du Damier, dont le plan-masse répond à celui de la Ferme Neuve, ensemble agricole du XVIIIe siècle situé de l'autre côté de l'autoroute A6, Aillaud organise la cité en sept quartiers (le Labyrinthe, le Méridien, la Ville-Haute, la Ville-Basse, la Peupleraie, les Enclos et les Radars), eux-mêmes divisés en vingt-sept secteurs d'environ 150 logements. Au cœur de chacun d'entre eux, l'architecte s'attache à travailler sur la notion d'espace public : ils sont conçus comme des entités autonomes possédant des caractéristiques et une ambiance propres, généralement organisés autour d'une place et d'une œuvre plastique dont ils tirent leurs noms. La place de l'Astrolabe est ainsi marquée en son centre par un obélisque de marbre noir dont l'ombre se projette sur un cadran dallé. Les références à la ville classique contribuent à donner à chaque secteur une identité architecturale forte : le secteur des "Places-Hautes" (places aux Herbes, de la Carpe, du Mouton et du Quinconce), avec leurs commerces en rez-de-chaussée des immeubles, se réfèrent aux bastides, tandis que ceux du Méridien, du Dédale et du Minotaure puisent leurs sources dans l'Antiquité. Au cœur de la cité se trouve un grand parc, la Plaine Centrale, véritable "poumon" paysager, qu'Aillaud conçoit autant comme un espace gagné sur la logique de densification des grands ensembles, qu'une échappée vers le rêve, permettant aux habitants de s'affranchir pour un temps de la proximité avec leurs voisins.

Le projet de la cité de la Grande Borne permet à Émile Aillaud d'approfondir ses recherches dans deux domaines : la préfabrication des éléments constructifs et surtout l'intégration d'un travail plastique poussé (couleurs, fresques, sculptures) au cadre architectural. Malgré le nombre élevé de logements, les baies des immeubles et des maisons se répartissent en trois modèles (un module carré de 135 centimètres de côté, une porte-fenêtre étroite de de 85 centimètres de largeur et une porte-fenêtre large de 135 centimètres) et les façades sont constituées de panneaux préfabriqués autoportants. Les façades courbes ont été réalisées avec le procédé Costamagna ; coulées sur place, avec un revêtement céramique en fond de moule, elles comportent une âme en brique creuse et des parois de béton sur les deux faces. Grâce à ces modules de base, Aillaud a pu composer, en les combinant de multiples façons, des élévations d'une grande diversité. L'expression artistique, partout présente dans la cité, achève de leur donner une singularité. Les sculptures de la fille de l'architecte, Laurence Rieti (le Serpent de mer du quartier des Radars, le Gulliver ensablé de la place de l'Oeuf) ou celles de François-Xavier Lalanne (les Pigeons de la place de la Treille, la Tête monumentale de la rue des Ateliers), par leur taille surdimensionnée ou leur caractère insolite, apportent une touche de poésie aux lieux. Les façades sont également animées de nombreuses mosaïques - le visage de Rimbaud, l’Écolière (Fabio Rieti) ou encore l'Okapi (Gilles Aillaud) - de pâtes de verre colorées et de grès cérame. "La Grande Borne est une cité de peintre autant que d'architecte" affirmait Émile Aillaud.

Cette mise en couleur a été modifiée par la réhabilitation conduite de 1983 à 1990 par les Ateliers Aillaud. Le réassort de certaines gammes de revêtements étant impossible à obtenir, l'architecte a choisi de les recouvrir d'écailles en amiante-ciment, dont le choix de nuances a été confié à Fabio Rieti. Cette réhabilitation, tranchant avec la subtilité des gammes d'origine, a malheureusement dénaturé la perception du projet.

L'opération de la Grande Borne s'inscrit dans un triangle de 90 hectares, délimité par trois voies importantes : au sud l'avenue Emile Aillaud (RD 310), à l'est l'autoroute A 6 et à l'ouest la route de Fleury / RN 445 / avenue Victor Schoelcher, à l'exception du quartier de la Ville-Basse, qui se déploie au sud de la RD 310 à la frontière avec la commune voisine de Fleury-Mérogis. Ce dernier quartier se compose de 206 maisons individuelles (les Patios) en rez-de-chaussée. Elles ont pour caractéristiques leur organisation en équerre, autour d'un jardin clos, ménageant une succession de venelles et de placettes piétonnes. Le centre est occupé par une école maternelle (la Licorne) et un petit ensemble de logements collectifs avec commerces en rez-de-chaussée. Le reste de la cité s'organise à partir de la place du Damier, au sud-ouest, dont le plan-masse répond à celui de la Ferme Neuve, ensemble agricole du XVIIIe siècle situé de l'autre côté de l'autoroute A6.

  • Murs
    • béton béton précontraint
  • Toits
    béton en couverture
  • Plans
    ensemble concerté
  • Étages
    en rez-de-chaussée, 1 étage carré, 2 étages carrés, 3 étages carrés, 4 étages carrés
  • Couvrements
  • Couvertures
    • terrasse
  • Techniques
    • sculpture
    • peinture
    • mosaïque
  • Statut de la propriété
    propriété publique
  • Précisions sur la protection

    Cet ensemble a été labellisé "Patrimoine du XXe siècle" en 2008.

Date d'enquête 2011 ; Date(s) de rédaction 2011
(c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel
Estignard Marie-laure
Estignard Marie-laure

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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Philippe Emmanuelle
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Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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