Le début du XXe siècle voit les premiers vols d’engins à moteur, créant rapidement un contexte d’émulation entre des passionnés (aviateurs et constructeurs) partageant un rêve commun, celui de voler. Fondée en 1908, la Société d’Encouragement à l’Aviation souhaite construire le premier aérodrome complet de France (comprenant pistes et bâtiments) sur des terrains qu’elle possède à Viry-Châtillon.
Le complexe est construit par l’architecte Guillaume Tronchet (1867-1959), formé à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris et Deuxième Second Grand Prix de Rome en 1892. Tronchet avait notamment fait sensation à l’Exposition universelle de Paris de 1900 à l’occasion de laquelle il présentait le palais des Forêts, Chasse, Pêche et Cueillette, le palais de la Navigation et du Commerce, ou encore le Cabaret, « La Belle Meunière ». Auteur de villas, pavillons ou équipements publics, le « port aérien de Juvisy » connu aussi comme Port-Aviation, peut être considéré comme l’une de ses premières réalisations, ainsi que comme le premier aérodrome du monde.
Les travaux de la piste de l’aérodrome, au bord de l’Orge, confiés à l’architecte Gabriel Voisin, s’achèvent à la fin de l’année 1908 et sont inaugurés dès le mois de novembre par l’aviateur Léon Delagrange. Ils sont suivis par celui des bâtiments du Port-Aviation dont la construction s’achève au cours de l’année 1909. Le premier meeting aérien est organisé le 23 mai 1909. L’ensemble comprenait, à l’origine, plusieurs bâtiments en plus des « champs de courses » qui ont été imaginés sur le modèle des hippodromes. L’élément central était constitué par une piste en ellipse de 4 km et la présence de gradins pouvant accueillit 7 000 spectateurs.
Bien qu’il soit le premier aérodrome de France, le lieu est malheureusement rapidement abandonné. Il est utilisé pendant la Première Guerre mondiale comme école d’aviation, mais l’instabilité du terrain contraint par des inondations régulières incite la Société à fermer Port-Aviation en 1919. Le terrain est alors divisé en parcelles, vendues à des propriétaires privés et progressivement loties dans les années 1920-1930. Aujourd’hui, il ne subsiste que le mess, édifice réservé aux officiers et sous-officiers et utilisé plus généralement en tant que salle commune. L’édifice, d’un plan irrégulier, est construit en pans de bois et possède, à l’intérieur, de vastes volumes ainsi qu’une mezzanine.
Propriété de l’Etat depuis 1983, le bâtiment était à l’abandon depuis plusieurs décennies. Labellisé « Patrimoine d’intérêt régional » (PIR) en 2019, il fait l’objet d’un programme de restauration sous l’œil protecteur de l’association de revalorisation du premier aérodrome organisé au monde de Port-Aviation.
Conservateur en chef du patrimoine, service Patrimoines et Inventaire, Région Île-de-France.