Le gymnase Jean-Jaurès est à l’origine une salle servant de stand de tir conformément à la volonté du Conseil municipal désirant des « gymnases publics où enfants et jeunes gens iraient s’exercer » à tirer. Sa construction est confiée à l’architecte Ernest Moreau (1828-1913). Diplômé de l’Ecole des Beaux-arts, Moreau devient, en 1860, architecte de la Ville de Paris jusqu’en 1890 ; il réalise notamment l’agrandissement des marchés de La Villette et donne les plans pour les abattoirs du même quartier.
Le projet du gymnase est lancé dès 1886, mais les travaux commencent seulement en 1888 et s’achèvent à la fin de l’année 1889. Inauguré le 10 mars 1890, la salle de tir accueille donc ses visiteurs à partir de cette date. Construit en brique, l’édifice présente également la particularité de réutiliser des fermes métalliques qui proviennent de la grande galerie des machines édifiée pour l’Exposition universelle de 1878. Elles sont les premières fermes de grande portée, mises au point par Henri de Dion, et réalisées par l’entreprise Moisant-Laurent et Savey. La halle est couverte d’une verrière zénithale apportant un éclairage naturel et diffus.
Le « gymnase d’Allemagne », du nom de la rue d’Allemagne (devenue avenue d’Allemagne puis avenue Jean-Jaurès en 1914), est l’objet d’un projet d’agrandissement lancé en 1907, car considéré en « mauvais état ». Les travaux sont confiés à l’architecte Charles Gautier (1846-1915), qui sort diplômé de l’Ecole centrale d’architecture en 1868 et de l’Ecole des Beaux-arts en 1869. Gautier se distingue lors de l’Exposition universelle de 1900 pour laquelle il édifie le Palais de l’horticulture et plusieurs autres aménagements. Architecte de la Ville de Paris et architecte en chef des Bâtiments civils et palais nationaux, il participe à de nombreux chantiers dans la capitale. Au gymnase, rebaptisé « Jean-Jaurès », il édifie une série de bâtiments encastrant la halle sur l’avenue et la rue Pierre-Girard. Sur l’avenue Jean-Jaurès, il s’agit de deux pavillons avec des porches servant d’entrées (comportant des guichets), magnifiées par un campanile surmonté d’un belvédère porte-fanion et de locaux annexes. À l’angle de l’avenue et sur la rue Pierre-Girard est édifié un bâtiment accueillant des bains-douches et des bureaux.
L’extension, réalisée en brique, comporte plusieurs éléments de décors qui magnifient la halle désormais cachée en cœur d’îlot. Il s’agit, pour les bains-douches, de décors en frise (réalisés en mosaïque à motif de croisées) sur les bandeaux séparant les niveaux et sur la corniche. Les baies du rez-de-chaussée sont pourvues d’encadrements partiels en brique polychrome. La façade sur rue est davantage magnifiée, puisqu’elle comporte des frises de céramique vernissée (en vert et blanc), des allèges de baies à décors géométriques et des encadrements de baies en béton orné d’éléments floraux et géométriques, à mi-chemin entre l’Art nouveau et l’Art déco.
Les pavillons de part et d’autre du campanile s’organisent autour de lignes rigoureuses tout en reprenant le vocabulaire ornemental des autres façades, mais s’en distinguent par un usage plus important du béton décoré de lignes de refends et d’éléments décoratifs. Les entrées sont enfin occupées par des grilles en fer à décor de spirale, en contraste avec les lignes géométriques rigoureuses de la façade. Le point d’orgue de cette façade constitue le campanile qui comporte un relief en pierre, représentant le blason de la Ville, un bateau à voile sur la Seine, sur sa base, et un relief comportant les inscriptions RF à son sommet.
Toujours en usage, l’édifice est inscrit au titre des Monuments historiques par arrêté préfectoral en date du 15 novembre 1994 (façades et toitures sur rues, et la halle métallique).