• enquête thématique régionale, lieux de spectacle 1910-1940
Porte Saint-Martin (10e arrondissement), théâtre de la
Œuvre monographiée
Copyright
  • (c) Stéphane Asseline, Région Ile-de-France

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Ile-de-France - Paris
  • Commune Paris 10e arrondissement
  • Adresse 16 boulevard Saint-Martin
  • Cadastre 2022 AY 55
  • Dénominations
    théâtre
  • Genre
    d'entrepreneur
  • Destinations
    salle de spectacle

Ancien théâtre de repli de l’Opéra royal élevé en deux mois et demi par Lenoir le Romain en 1781, « citadelle du romantisme » dans les années 1830, incendié lors de la Commune, reconstruit en deux ans et accueillant en 1897 la première de Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand… l’histoire de cet établissement mythique forme un tableau à elle seule[1]. La gestion de Maurice Lehmann, directeur (dès 28 ans) de 1924 jusqu’en 1938, est à l’image des tumultes de l’établissement. Après des reprises de succès, puis divers déboires, il choisit en 1931 de métamorphoser l’institution pour la relancer.

Pour cette remise à jour, il emprunte un chemin de crête entre tradition et modernité. Il choisit de ne pas sacrifier totalement l’édifice, contrairement à ce qui a été fait aux Bouffes-Parisiens. Ainsi, Lehmann rétablit effectivement la façade suivant le projet de La Chardonnière de 1871, supprimant simplement l’oriel et la marquise métallique ajoutée en 1891, « qui n’ajoute[nt] rien à l’élégance du bâtiment[2] ». La façade avec ses bossages, ses atlantes encadrant les trois portes d’entrée centrales et son arcade aux écoinçons sculptés retrouve sa signification et son identité : une version revisitée de l’arc de triomphe voisin[3]. De même sont maintenus les décors, peintures, dorures et vitraux du foyer à double hauteur, qui préservent toujours l’ambiance Belle Époque des grandes heures du Cyrano.

En revanche, le reste des espaces accessibles aux clients et la salle ont été revus de fond en comble. Afin que « chaque spectateur ait un confort unique, comme jamais il n’a encore eu à Paris[4] », hall et billetterie abondamment éclairés sont rassemblés[5] pour « pouvoir circuler facilement pendant l’entracte[6] ». Lehmann ne prend cependant pas forcément modèle sur les architectes renouvelant alors l’architecture du spectacle. Il assimile leurs principes comme inhérents à la projection cinématographique[7]. Au conditionnement psychologique limité aux jeux de lumière, il préfère les moyens architecturaux « classiques » qui ont encore leur mot à dire. D’où une esthétique Art déco assumée, avec des mascarons couronnant les loges et un cadre de scène doré. Elle se concentre sur les lignes de force de la composition (balcons, loges, cadre…) sans pour autant négliger les détails ornementaux. Certains rapprochent cette réalisation de l’Opéra de Marseille[8]. La disposition des rangées de sièges, « séparés de 90 cm[9] », procède de la même logique, maintenant cependant la capacité de la salle à 2 000 places. Enfin, Lehmann ajoute à la scène, « une des plus vastes que l’on trouve à Paris[10] » (27 m par 17), un jeu d’orgues et un plateau tournant[11]. La machinerie ancienne a été préservée.

L’ouverture du 2 octobre 1931, largement commentée par la presse généraliste, remet effectivement en selle le théâtre, qui devient dès 1933 un temple de l’opérette avec Les Valses de Vienne. Aujourd’hui la direction du théâtre de la Porte Saint-Martin assure une programmation éclectique alternant grands classiques et créations.

[1] Citation extraite de BLANQUET, Marc, « Un anniversaire théâtral – La « Porte Saint-Martin va fêter ses 150 ans », Le Journal, 2 octobre 1931. Pour l’historique et les pièces qui y ont été jouées, voir pour plus de détails LATOUR, Geneviève et CLAVAL, Florence, « Théâtre de la Porte Saint-Martin », Les théâtres de Paris, 1991, p. 123-127.

[2] NOVY, Yvan [reprise des propos de Lehmann], op. cit.

[3] « Paris 10e - Théâtre de la Porte Saint-Martin », Fiche de recensement des monuments anciens de la France. Paris : secrétariat d’État à la Culture, 14 mai 1976.

[4] GREGORIO, Simon [reprise des propos de Lehmann], « Le théâtre se réorganise – À la Porte Saint-Martin entièrement transformé désormais un bar au lieu de la « boîte à sel » accueillera les spectateurs », Comœdia, 29 septembre 1931.

[5] NOVY, Yvan [reprise des propos de Lehmann], op. cit. ; Anonyme, « Un évènement parisien – L’inauguration du nouveau théâtre de la Porte Saint-Martin », L’Ami du Peuple. Paris, 7 octobre 1931.

[6] Ibid.

[7] NOVY, Yvan [reprise des propos de Lehmann], op. cit. : « C’est une des supériorités que le théâtre peut encore avoir sur le cinéma. Les salles cinématographiques sont confortables, elles sont rarement gaies. La technique de la projection en est cause. Les directeurs de salles modernes de cinéma s’en sont rendu compte. Ils se sont efforcés de remédier à cet inconvénient par des jeux multicolores de lumières pendant les entr’actes et les attractions. Mais ils ne peuvent détruire l’effet de sécheresse architecturale indispensable au principe même de leur exploitation. Nous pouvons, nous, dans ce sens, faire beaucoup mieux. »

[8] Collectif, « Séance du 9 mai 1990 – Théâtre de la Porte Saint-Martin », Commission régionale du patrimoine historique, archéologique et ethnologique d’Île-de-France. Paris, 9 mai 1990.

[9] GREGORIO, Simon, [reprise des propos de Lehmann], op. cit.

[10] « Paris 10e - Théâtre de la Porte Saint-Martin », op. cit.

[11] LATOUR, Geneviève et CLAVAL, Florence, op. cit., p. 127.

La façade est rétablie suivant l'état de la restructuration après la Commune (1871). Elle présente des bossages, des atlantes encadrant trois portes d'entrée centrales, et une arcade aux écoinçons sculptés, version revisitée de l’arc de triomphe voisin. Le foyer à l'étage maintient les décors, les peintures, les dorures et les vitraux du foyer à double hauteur, évocation de la Belle Époque. Les autres espaces (rez-de-chaussée et théâtre notamment) ont été réaménagés en 1931 pour le confort des spectateurs. Hall et billetterie abondamment éclairés sont rassemblés pour une meilleure circulation. La salle de 2000 places Art déco présente des mascarons couronnant les loges, et un cadre de scène doré. Bien que Lehmann ajoute à la scène un jeu d’orgues et un plateau tournant, la machinerie ancienne a été préservée. Malheureusement, aucune source ne permet d'identifier l'auteur des réaménagements de 1931.

  • Murs
    • pierre moyen appareil bossage
  • Toits
    zinc en couverture, verre en couverture
  • Plans
    plan régulier en L
  • Étages
    sous-sol, rez-de-chaussée, 2 étages carrés, comble à surcroît
  • Couvrements
    • fausse coupole sans trompe
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • Couvertures
    • extrados de voûte toit à longs pans lanterneau
  • Escaliers
    • escalier dans-oeuvre : escalier de type complexe cage ouverte
    • escalier dans-oeuvre : escalier tournant à retours sans jour cage ouverte
  • Typologies
    salle à l'italienne (2e moitié 19e siècle) ; salle à l'italienne (réaménagement) (1ère moitié 20e siècle)
  • État de conservation
    bon état
  • Techniques
    • décor stuqué
    • sculpture
  • Représentations
    • ornement architectural, colonne
    • ornement géométrique, denticule, feston, palmette, postes, volute
    • ornement végétal, feuillage, acanthe, laurier
    • ornement figuré, figure fantastique humaine ou semi-humaine, humain fabuleux, mascaron symbole des arts,
  • Précision représentations

    Avant-scènes dont les loges supérieures sont incorporées dans des niches surmontées d'un mascaron en agrafe stylisé.

  • Mesures
    • Nombre de places : 2 000 personnes ((jauge du réaménagement de 1931))
  • Statut de la propriété
    propriété d'une société privée
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Éléments remarquables
    élévation, galerie ouverte, théâtre, vestibule
  • Sites de protection
    site inscrit
  • Protections
    inscrit MH, 1992/03/30, 2014/03/10
  • Précisions sur la protection

    Entrée, hall, escaliers, foyer, salle et scène, ansi que façade et toitures : inscription au 30 mars 1992 rectifiée le 10 mars 2014.

  • Référence MH

Bibliographie

  • « Théâtre de la Porte-Saint-Martin », in LATOUR, Geneviève et CLAVAL, Florence. Les théâtres de Paris. Paris : Action artistique de la ville de Paris, 1991, p. 123-127

    « Théâtre de la Porte Saint-Martin (1872 et 1930) », in MIDANT, Jean-Paul. « Paris est une fête ». Défense et illustration de l’architecture du spectacle. Paris : Direction régionale des Affaires culturelles d’Ile-de-France, 1990, p. 102-108

    « Théâtre de la Porte Saint-Martin », in RAOULT, ?. Annuaire du théâtre. 1944-1945. Paris : Annuaires néo-techniques, 1945, p. 280-281

Périodiques

  • « A la Porte Saint-Martin », Le Figaro. Paris, 28 septembre 1931

    Bibliothèque nationale de France, Paris
  • GREGORIO, Simon, « Le Théâtre se réorganise – A la porte Saint-Martin entièrement transformé, désormais un bar au lieu de la « boîte à sel » accueillera les spectateurs ». Comoedia. Paris, 29 septembre 1931

    Bibliothèque nationale de France, Paris
  • NOVY, Yvon, « Le Théâtre de demain – Les idées de M. Maurice Lehmann sur la lutte entre théâtre et cinéma et les transformations de la Porte Saint-Martin », Comoedia. Paris, 27 avril 1931

    Bibliothèque nationale de France, Paris
Date(s) d'enquête : 2017; Date(s) de rédaction : 2022