Dossier d’œuvre architecture IA75000036 | Réalisé par
  • étude d'inventaire
résidence d'étudiants dite Collège franco-britannique
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Cité internationale universitaire de Paris (CIUP)
  • Commune Paris 14e arrondissement
  • Adresse 9 B boulevard Jourdan
  • Dénominations
    cité universitaire
  • Précision dénomination
    résidence d'étudiants
  • Destinations
    architecture scolaire

Les origines du projet : des relations difficiles avec le British Institute in Paris

Dès juillet 1921, Charles Walston, professeur à l'université de Cambridge, fait circuler parmi les intellectuels anglais une lettre destinée à recueillir des signatures en faveur d’une résidence d’étudiants à Paris ; une notice sur la Cité universitaire est publiée dans tous les journaux anglais. En avril 1922, accompagné du correspondant du Times à Paris, il visite le domaine sous la conduite de Lucien Bechmann, architecte-conseil de l'université de Paris, et d’A. Henri Becker, secrétaire particulier d’Emile Deutsch de la Meurthe. Le 1er juin 1922, le recteur l’informe qu’"une option de deux ans au plus à partir du 1er janvier1923 » pourrait être concédée, tant à l’Angleterre qu'aux Etats-Unis, sur les bandes de terrain 4 et 5 voisines de la fondation canadienne - sous réserve qu’une demande formelle lui soit adressée avant cette date (terme qui est prolongé ensuite jusqu’au 1er avril). Walston se met à l’oeuvre pour réunir des fonds, mais ne parvient à collecter que quelques milliers de livres sterling.

Le projet est relancé sur d’autres bases en 1926. A la suite d’une réunion tenue à la Mansion House (hôtel de ville), à Londres, un comité est constitué en novembre sous le nom de Fund for the British Institute in Paris ; présidé par Lord Derby, ancien ambassadeur du Royaume-Uni à Paris, il s'est donné un double objectif : l’établissement à Paris d’un centre de culture britannique et la construction d’un Collège à la Cité universitaire. Dès le 22 février 1927, l’ambassadeur à Paris Lord Crewe signe, au nom de ce comité, un acte notarié qui, le 8 mai suivant, fait l’objet d’un décret approbatif rendu en Conseil d’Etat. Cet acte prévoit la donation à l’université de Paris d’une somme de 300 000 francs destinée à constituer les premières ressources d’une fondation dénommée « Université de Paris, British Institute in Paris ». Pour le compte de l’université, cet Institut a d’abord l’obligation d’acquérir le bâtiment de l’ancienne Guilde internationale, situé au 6 de la rue de la Sorbonne, et d’y « développer et poursuivre » des enseignements spéciaux formant « le complément pratique des leçons données à la Faculté ». Il doit également procéder à l’édification d’un immeuble d’environ 300 chambres sur un terrain mis à sa disposition dans l’enceinte de la Cité universitaire.

Le mois suivant, une société anglaise sans but lucratif constituée par autorisation du gouvernement anglais le 13 avril 1927 et enregistrée à Londres le 14 mai 1927, sous le nom de British Institute in Paris, est substituée au Fund. Cet Institut est dirigé par un comité londonnien, et un comité exécutif à Paris (dont l’ambassadeur d'Angleterre est président) destiné à mener à bien la création de la fondation britannique.

Le siège de ce comité est installé dans les locaux de la Guilde, rachetée et transformée de fond en comble, avec le concours de Paul Nénot, architecte de la Sorbonne, et grâce à une subvention de 974 000 francs octroyée par le Fund. En revanche, la deuxième obligation - la construction d'un pavillon à la Cité universitaire - ne sera jamais remplie par le comité, et la Fondation nationale, se substituant à celui-ci, acceptera d'édifier et de gérer elle-même le bâtiment, à l'issue de longues et difficiles négociations.

L’université de Paris s’acquitte rapidement de l’engagement qu’elle a contracté : par arrêté du 22 juin 1927, le recteur attribue à l’Institut un terrain de 6 269 m2 (soit près de 300 m2 de plus que la superficie correspondant au nombre d’étudiants prévu). Le prince de Galles préside la pose de la 1ère pierre de l'édifice le 8 juillet 1927.

Quelques mois plus tard, le 25 janvier 1928, Edward Warren, architecte de l’université d’Oxford, fait parvenir à la Fondation nationale les plan d’ensemble et élévations du futur « college », qui lui ont été commandés par le comité. Deux séries de plans sont ensuite transmises par Maurice Chatenay, architecte de l’ambassade d’Angleterre qui doit être le correspondant parisien de l’architecte anglais, pour examen par Lucien Bechmann. Mais à l’étape suivante – l'approbation indispensable de ces plans par le recteur – le comité se heurte à un refus catégorique tant de ce dernier que de la Fondation nationale : c’est qu’au lieu de produire les plans complets, il n'en a remis le 15 mai 1928 qu'une fraction, correspondant à la partie du bâtiment réservée aux étudiantes, d'une capacité de 53 chambres. Selon Lord Crewe (lettre de la fin janvier 1929), ce changement de parti s'explique par le fait que le comité, malgré tous ses efforts, n'a pas pu recueillir les souscriptions nécessaires : la crise industrielle qui sévit durement en Angleterre l’a privé d’une large part des ressources sur lesquelles il comptait ; d'autre part, les étudiants britanniques ne seraient sans doute pas assez nombreux pour remplir un collège de 300 chambres. Les universités anglaises ont exprimé de graves doutes à ce sujet.

Pour André Honnorat et la Fondation nationale, des raisons d’un tout autre ordre se conjuguent avec ces difficultés financières. Une campagne serait menée à Cambridge contre la Cité universitaire, et "le succès [même de celle-ci], représentée « comme une des manifestations les plus certaines de notre impérialisme », n’a pas « atténué les hostilités auxquelles le projet de Lord Crewe et de Lord Derby s’[est] heurté dès l’origine » (lettres du 1er février au ministre de l’Instruction publique et du 14 février au recteur). Dans certains milieux universitaires britanniques, on « n’hésite pas à combattre l’idée même qui a présidé à la création de la Cité sous prétexte que les étudiants étrangers qui viennent à Paris ont tout avantage à prendre pension dans des familles françaises » pour mieux se familiariser avec la langue et la vie françaises.

Le total des fonds recueillis s’élève alors à un peu plus de 61 000 £, dont 24 000 £ (3 millions de francs) versées en 1927 par Helen Nathan, veuve du négociant britannique Edward Nathan, qui vit entre entre Manchester et Paris et a déjà effectué plusieurs donations à l'université de Paris pour ses laboratoires et la recherche scientifique. Sollicitée par le président de la Chambre de commerce française de Londres, Tony Jules Guéritte (par ailleurs oncle de l’architecte Armand Guéritte, qui a travaillé à la Cité universitaire), la colonie française ne semble guère, pour sa part, avoir répondu à l’appel lancé dans une revue technique de Londres.

La partie du bâtiment destinée aux étudiantes inclue, le comité britannique fait savoir à Paris que le bâtiment ne pourra pas, en définitive, comporter plus de 100 chambres, l'insuffisance de son budget le contraignant à réduire dans une forte proportion les plans primitivement établis. A la suite de multiples démarches de la Fondation nationale, il consent cependant, en mars 1930, à tenter un nouvel effort pour essayer de porter ce chiffre à 200.

Des ressources supplémentaires viennent en effet de lui parvenir - bien que "ni le gouvernement de sa Majesté, ni celui d’aucun des Dominions, ne se trouvent portés à [l'] aider" : en janvier, Helen Nathan s’engage à léguer 3 autres millions de francs « à charge d’un accord parfait avec les autorités de la Cité universitaire pour la construction entière ». Dans le même temps, Honnorat n’hésite pas, de son côté « à faire appel au concours du neveu de Mme Nathan, M. Kulp », un de ses amis, pour décider la donatrice à remettre immédiatement au comité cette somme qu’elle a l’intention de lui léguer par testament. « Cela tirerait le comité d’embarras et il pourrait enfin s’acquitter de ses obligations ». En contrepartie, Helen Nathan exige d’avoir la promesse ferme que son nouveau don de 24 000 £ servira à construire une cinquantaine de chambres en plus de celles qui auraient trouvé place dans le bâtiment sans cette donation ; que ces chambres seront affectées à des jeunes gens ; qu’elles se trouveront dans un corps de bâtiment (aile ou pavillon) ayant son entrée propre, c’est-à-dire son autonomie apparente ; que ce corps de bâtiment portera le nom de son mari et le sien ; enfin que les travaux commenceront dès l’été 1930.

Edward Warren étudie donc un nouveau projet, avec 200 chambres, dont une partie se distinguera clairement du reste du bâtiment comme « Fondation Helen et Edward Nathan ». Les travaux commenceront avant le 1er juillet ; d’après les évaluations du contrôle des services d’architecture des Beaux-Arts, la dépense à prévoir n’atteindrait pas 12 millions de francs, soit une somme sensiblement inférieure à celle de 100 000 livres sterling dont le comité dispose désormais.

Aucune difficulté ne paraît donc plus se poser, lorsqu’une lettre reçue de lord Crewe semble indiquer que « des objections d’un autre ordre vont maintenant être présentées par le comité anglais » (Fondation nationale, comité de direction du 10 juillet 1930).

Le Comité a en effet pris la décision de limiter à 140 le nombre des chambres du futur collège, 90 pour les étudiants et 50 pour les étudiantes : le bâtiment prévu par l’architecte pour les jeunes gens sera réduit en longueur d’un 10e et celui des jeunes filles sera moins élevé, « ce qui permettra de faire accéder plus largement le soleil dans la cour ». Sir Theodore Morison (ancien vice-chancelier de l’université de Birmingham), venu tout exprès de Londres à Paris pour faire part de cette décision à la Fondation nationale, précise que si elle n’est pas acceptée telle quelle, le comité renoncera définitivement à construire. Face à cet ultimatum,la Fondation accepte le principe d’une construction sur des plans réduits.

Le 20 décembre, André Honnorat s’inquiète de ne rien recevoir de la part de Warren, mais les plans lui parviennent finalement le 1er février et sont aussitôt transmis pour observation à Bechmann. Celui-ci aurait dû faire de sérieuses réserves, les 140 chambres utilisant la totalité du terrain prévu pour 200 et l’aménagement intérieur du bâtiment devant entraîner « le maximum de dépenses d’exploitation pour le minimum de recettes ». Mais la Fondation nationale « [voulant avant tout] en finir », le projet est accepté tel quel.

L’envoi des plans ne s’accompagne cependant d’aucune lettre du comité relative aux formalités permettant d’obtenir le permis de construire. Le 13 février, Sir Morison fait savoir que dès son retour à Londres, le comité adressera à ses interlocuteurs le document nécessaire. Mais le 3 avril, celui-ci n’est toujours pas parvenu à la Fondation nationale, qui est désormais convaincue qu’« il est bien dans les intentions du Comité de se délier de ses promesses », comme l’indiquent les amendements qu’il envisage d’apporter à l’acte du 26 février 1927.

En effet, en décembre 1930, une nouvelle rédaction de l’article 10 est communiquée à André Honnorat : l’université de Paris devra mettre à la disposition des donateurs un terrain d’une superficie permettant de construire un bâtiment de 200 chambres, mais ceux-ci auront toutefois la « faculté de réduire d’un quart environ le nombre des chambres qu’ils s’obligent à y aménager immédiatement » tout en s’engageant à achever ces travaux dans un délai de deux ans.

Puis le 24 février 1931, un nouveau texte parvient au recteur : il s’agit cette fois, non plus d’amender l’acte de donation initial, mais de lui substituer un nouveau document « rendant l’université de Paris comme ses mandataires complètement tributaires d’une société anglaise ayant son siège à Londres et contre laquelle ils ne pourraient avoir aucun recours ». L’article 5 précise en effet que l’université de Paris n’aura plus de contrôle à exercer sur l’administration de la fondation, et que la moitié au moins des membres du conseil d’administration sera désignée par le British Institute. « Comment l’université pourrait-elle accepter qu’une institution qui fait partie d’elle-même soit soustraite en droit à son contrôle et administrée, en fait, par une société étrangère, dans laquelle elle n’a et ne peut avoir aucun représentant ? » Ce projet d’acte (apporté par T. Morison à Paris) contient de plus une clause relative à l’aménagement des services communs de la Cité « ayant pour effet certain de retarder d’au moins 5 ans le commencement de la construction du Collège ». Les Anglais subordonnent en effet la construction du bâtiment à l’évacuation de la zone, comme l’indique un rapport présenté par Lord Crewe le 4 mars à l’assemblée générale de l’Institut britannique à Londres, déplorant que « le cercle et les terrains de jeux qui doivent être aménagés à la Cité universitaire ne sont pas encore prêts pour diverses raisons ». Si le Comité affirmait son intention de ne pas construire avant d’être assuré « que les étudiants [britanniques] trouveront à la Cité toutes les facilités pour les jeux et la vie commune sur lesquels on a compté à l’origine, cela serait de nature, selon lui, à hâter » la réalisation de ces équipements.

Excédée par les procédés dilatoires du comité, la Fondation nationale soumet de nouvelles propositions à l’ambassadeur Lord Tyrrell : elle pourrait se charger d’édifier elle-même le bâtiment projeté (selon les idées générales des plans de Warren) en demandant au comité du British Institute la cession des 6 millions de francs légués par Mme Nathan - la loi sur l’outillage national qui vient d’être promulguée ayant mis à sa disposition des ressources lui permettant de compléter cette somme. Les étudiants britanniques recevraient un nombre de chambres correspondant à la part des dépenses couverte à l’aide des donations Nathan. Les exécuteurs testamentaires de la donatrice (décédée en juin 1931, à l’âge de 91 ans) Jacques Kulp, administrateur de la Banque de Paris et des Pays-Bas et son neveu René Gaston-Dreyfus, se rallient entièrement à cette solution – non sans faire valoir que le retard pris dans l’exécution du projet est la cause d’un grave préjudice matériel : les fonds versés par Helen Nathan et déposés dans un compte spécial chez Coutts et Cie à Londres ont été convertis en livres sterling par le trésorier du British Institute, et la dépréciation récente (depuis le 19 septembre 1931) de la livre cause une perte de l’ordre de 2 millions de francs.

Un projet de convention est adressé à Lord Tyrrell le 18 mars 1932. L’article 1 confie à la Fondation nationale le soin d’édifier, d’aménager et meubler le futur immeuble. L’article 3 fixe à 48 000 £ la somme que le British Institute in Paris s’engage à lui verser au titre des donations d'Helen Nathan ; le British Institute devra en outre constituer un fonds de 12 000 livres dont il ne fera emploi que « pour les buts qui ont inspiré les donations de Mme Nathan ». Selon l’article 4, la Fondation nationale aura toute latitude pour faire dresser de nouveaux plans par un architecte de son choix. Elle gèrera elle-même l’immeuble qui prendra le titre de « Collège franco-britannique (Fondation Edward and Helen Nathan) » (article 5). Les chambres seront affectées par ses soins pour partie à des étudiants britanniques et pour partie à des étudiants français (article 8) – ce qui désarme l’opposition des milieux universitaires d’outre-Manche contre l’idée d’une maison purement anglaise où leurs nationaux se retrouveraient entre eux, sans fréquentations avec leurs camarades français. Le nombre de chambres réservées par priorité aux premiers correspondra à la proportion que représentera la part des dépenses couverte à l’aide de la somme provenant des donations de Mme Nathan. Enfin, selon l’article 9, le comité de Londres pourra, s’il le veut, rembourser la Fondation nationale de ses dépenses, ou totalement ou partiellement, et augmenter ainsi le contingent des étudiants britanniques appelés à résider à la Cité.

Le 21 mars 1932, Jacques Kulp donne son accord à ce texte, et René Gaston-Dreyfus le 7 avril suivant, malgré l’importante réduction (d’un tiers environ) subie par la donation de leur tante.

A la demande de l’ambassadeur, quelques précisions sont apportées le 7 avril par la Fondation nationale : comme le souhaite le comité, elle demandera à son architecte de s’inspirer, dans toute la mesure du possible, des élévations dressées par E. Warren – du moins pour l’aspect extérieur, car « ces plans comportent des installations extrêmement dispendieuses pouvant majorer dans de fortes proportions les dépenses de construction et d’exploitation du bâtiment ». Son intention est bien de construire un bâtiment de 200 chambres. Quant aux services généraux, les plans du bâtiment destiné à « abriter le club des étudiants sont maintenant au point », et la ville de Paris vient d’entreprendre les travaux de nivellement des terrains sur lesquels le parc doit être aménagé.

La convention qui constitue un règlement définitif de toutes les questions en litige entre la Fondation nationale et le comité londonien, est signée le 15 avril 1932 par le président de l’Institut britannique de Paris, Lord Tyrrell, ambassadeur, André Honnorat et Jean Branet, secrétaire général de la Cité universitaire. Elle ne deviendra exécutoire que le jour où les termes de l’acte signé le 22 février 1927 auront été mis en harmonie avec les dispositions de cette convention. Mais à la demande de l’ambassade d’Angleterre, le nouvel acte se borne à énumérer les corrections qu’il y a lieu d’apporter à celui de 1927. Le 27 juin 1932, le conseil de l’université de Paris autorise le recteur à signer l’acte modificatif et approuve l’accord du 15 avril entre Lord Tyrrell et la Cité universitaire. Ce nouvel acte est signé le 26 juillet 1932. 48 heures après l’échange des signatures, l’ambassade d’Angleterre fait remettre les 48 000 £ (4 464 000 francs en 1932) qui sont déposées à la Banque de Paris.

Il reste cependant à la Fondation nationale à régler un autre différend, celui qui s’est élevé entre le British Institute in Paris et l’université à propos des dons Lebaudy.

De 1926 à sa mort en 1931, et bien que sous la forme de dons anonymes, Robert Lebaudy a remis à l’Institut différentes sommes s’élevant à une valeur d’environ 35 000 £ (4 375 000 fr). Ces dons étaient destinés par lui à la cause du rapprochement intellectuel de l’Angleterre et de la France dans le cadre et sous le signe de la Cité universitaire. Bien que versés au trésorier de l’Institut britannique de Paris, ils ont été placés en dépôt à Londres et le comité londonien se considère comme ayant le droit d’en disposer à son gré.

Pour les responsables de la Cité, s’il n’existe pas de texte ayant valeur légale, il « ressort nettement de la correspondance et des conversations échangées [avec R. Lebaudy] que la seule affectation prévue pour ses libéralités » était bien une maison d’étudiants à Paris. Mais le comité de Londres « sans nier la réalité des faits, semble contester l’interprétation donnée aux intentions du donateur » et croit pouvoir affecter ce capital non pas spécialement à la construction d’une maison britannique, mais aux activités diverses de l’Institut – et en particulier au fonctionnement de l’ancienne Guilde qui faute de donations complémentaires, a du mal à subvenir à ses besoins propres. Il prétend aussi que Robert Lebaudy destinait ses dons à un organisme qui ne serait pas seulement un « hôtel pour les étudiants, mais aussi un foyer d’études anglaises ». Puis il conteste la possibilité de les affecter à la maison qui va être construite, parce qu’au lieu d’être la « maison britannique », elle sera une maison franco-britannique.

Face à cette situation, la Fondation nationale, dans son conseil d’administration du 20 décembre 1933, charge une commission (composée de Sir Henry Campbell, ministre plénipotentiaire à l’ambassade d’Angleterre, Jean Branet, secrétaire général de la Fondation et le recteur Coulet) d’élucider complètement la question et de rechercher les bases d’un accord éventuel. La Cité propose que sur les 61 000 £ de la donation (capital et revenus), il lui soit versé 40 000 £, le surplus étant attribué à la Guilde à titre définitif. Ce chiffre de 40 000 £ est déclaré inacceptable par Sir Theodore Morison en raison des charges incombant à l’Institut du fait de la Guilde. Il propose le chiffre de 12 000 £ et, avec plus de réserves, celui de 15 000. La commission dans sa 2e séance du 25 juin 1934, ne peut que constater le désaccord persistant. Selon l'avis de son président (7 juillet 1934), la seule solution consisterait à recourir à un arbitrage. Les arbitres auraient qualité pour décider définitivement sur le principe et sur le chiffre qui devrait être remis à l’université de Paris. Toutefois de « nouvelles possibilités de transaction s’étant offertes » au début du mois de mai 1936, Branet juge utile d’« aller à Londres même s’assurer plus directement de leur réalité ». En décembre, le comité accepte de clore le différend par le versement de 28 500 livres sterling. Le 30 novembre 1937, la Fondation nationale accuse réception de cette somme (augmentée d’intérêts de 3% par an à compter du 1er janvier 1937), soit 29 716 £ (ou 5 287 569 francs). L’accord comporte deux obligations : selon la première, le nombre de chambres à attribuer par priorité aux étudiants désignés par le British Institute sera porté de 81 à 141. Selon la seconde, la somme ainsi versée doit être affectée « soit à l’atténuation du coût de la construction du Collège, soit à l’entretien et à l’amélioration de ce bâtiment ». Le 15 mars 1939, le conseil de la Fondation nationale décide qu’elle viendra en déduction des charges que la Cité universitaire s’est imposées pour construire le Collège.

Au total les dépenses engagées pour le Collège franco-britannique (construction, équipement, ameublement) peuvent être évaluées à 11 millions de francs. Les sommes provenant de la donation Nathan s’élèvent à 4 millions en chiffres ronds et, le surplus, soit 7 millions, est prélevé sur les avoirs propres de la Cité, en attendant que soit défalquées les sommes versées au titre des donations Lebaudy.

La construction du Collège franco-britannique

Début avril 1932, la Fondation nationale charge Pierre Martin et Maurice Vieu (concepteurs en 1928 de la Maison des étudiants de l'Indochine) de dresser les plans du Collège ; elle avait décidé, en effet, à l'issue du concours ouvert pour la Maison des Provinces de France, où ils s'étaient classés seconds, de leur confier le deuxième bâtiment qu’elle pourrait être amenée à construire. Elle s’est engagée d’autre part envers le Comité de Londres à ce que leur projet s’inspire autant que possible des élévations de leur confrère anglais.

En juillet les architectes lui soumettent leur avant-projet, transmis ensuite au comité de Londres et au neveu d'Helen Nathan, M. Kulp. Dans un souci d’économie, Lucien Bechmann, architecte-conseil de la Fondation nationale, suggère de limiter au soubassement l’emploi de la pierre dure – la brique, de types ou de couleurs différents, pouvant être utilisée en élévation – et de prévoir l’encadrement des fenêtres soit en pierre artificielle, soit en pierre tendre avec revêtement de zinc. La suppression de certains détails, en particulier les tourelles et clochetons, permettrait également de réduire la dépense sans nuire à l’effet d’ensemble. Cet avant-projet présente deux options : une réalisation complète (3 étages carrés, plus un 4e étage carré sur l’aile ouest seulement), et une autre sans le 4e étage de l’aile ouest, ce qui entraînerait une réduction de 15 chambres (ramenant le total à 200). Le 25 octobre 1932, le contrôleur général des Beaux-Arts se prononce en faveur du projet complet, plus avantageux à réaliser.

Une nouvelle étude est mise au point à la fin de l’année (prévoyant 218 chambres d’étudiants au lieu de 215 et 15 chambres de service au lieu de 14), qui, le 3 février 1933, fait l’objet d’un rapport favorable du contrôle général. Le terrassement commence vers le 1er mars 1933 et la construction proprement dite le 1er juillet. Le chantier prend du retard sur les prévisions – 40 jours environ au 2 février 1934 – du fait d’une mise en route trop tardive par l’entreprise Lafond, de travaux de fondations plus difficiles que prévu, et d’une période de gel ininterrompue en décembre. Au 31 mai 1934, l’ossature de béton armé est terminée, un tiers des murs extérieurs du sous-sol est exécuté, avec un retard de 2 mois et demi. Le 15 mai, les travaux sont interrompus à la suite d’une livraison de briques non conformes aux échantillons acceptés. Le chantier s’achève le 1er juillet 1936 (il a duré 36 mois au total). L’ouverture de la fondation a eu lieu trois mois plus tôt, le 1er avril 1936, date à laquelle le collège aurait dû être livré complètement achevé ; mais jusqu’en juin des groupes de passage et quelques résidents cohabitent avec de nombreux ouvriers dans « un hall sans boiseries, sans plancher, sans plafond, des corridors sans linoléum et des chambres sans portes. Les grèves de juin ont ajouté au retard et c’est seulement en août que les ouvriers ont quitté la maison, au mois d’octobre que le collège a pu ouvrir normalement ». La réception définitive des travaux a lieu le 15 juillet 1937. Pour la cérémonie d’inauguration, remise deux fois et fixée finalement au 16 juillet 1937, des invitations sont envoyées aux universités, aux collèges et aux autorités scolaires britanniques, et la direction des chemins de fer de l’Etat, à la demande de la Fondation nationale, met à leur disposition des permis gratuits pour se rendre à Paris. 18 universités anglaises sur 22 sont représentées par une délégation.

De la Seconde guerre mondiale à nos jours

Comme la plupart des autres fondations de la Cité universitaire, le collège est fermé pour la durée de la guerre. A partir du 14 juin 1940, il est occupé constamment par les troupes allemandes ; deux compagnies d’infanterie d’un effectif total d’environ 300 hommes se succèdent généralement pour des périodes de 2 mois. Au mois de mai 1942 les troupes sont remplacées par des femmes des services auxiliaires de l’armée, qui continuent à occuper la maison. De nombreux objets (vaisselle, livres, tapis et objets d’art) sont enlevés par les soldats et un grand nombre de meubles sont très endommagés : en tout 75% du mobilier a disparu ou a été dégradé au-delà de toute réparation et « les 25% qui restent ont perdu les ¾ de leur utilité et de leur valeur ». L’installation sanitaire est en très mauvais état, « l’appareillage électrique est détraqué », etc. La remise en état est entreprise dès la fin de la guerre, mais en 1948 il reste encore beaucoup à faire pour rendre à la maison son aspect d’origine.

Les bâtiments ne connaissent ensuite que peu de réparations et de travaux de modernisation si bien qu’au milieu des années 1990, ils exigent des investissements importants, proches de 2 millions de francs. Une campagne de rénovation importante est entreprise entre 1999 et 2001, puis à nouveau 2007-2008, sous la direction de l’architecte Vincent Sabatier. La salle des petits déjeuners, en rez-de-jardin, est transformée en auditorium, et le grand hall en « club des chercheurs » de la Cité, dans le cadre d’une convention avec la région Ile-de-France, avant d'être rendu aux résidents du Collège. Les travaux permettent aussi d’augmenter et de varier l’offre de logements : outre 210 chambres avec sanitaire indépendant, 66 studios équipés d’une kitchenette sont réservés désormais à l’accueil d’enseignants-chercheurs internationaux.

En 2015-2016, le jardin est redessiné et rénové pour recevoir de nombreuses espèces colorées sur le principe des mixed-border, en référence à la tradition anglaise, mais en conservant quatre arbres d’ornement. Réalisé par les équipes du domaine de la Cité internationale, en collaboration avec le Centre de formation professionnelle et de promotion agricole horticole de Saint-Germain-en-Laye (CFPPAH), ce projet est conçu par l’agence TN PLUS, en charge du volet paysager dans le futur réaménagement du parc.

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  • Période(s)
    • Principale : 2e quart 20e siècle , daté par source
  • Auteur(s)
    • Auteur :
      Martin Pierre
      Martin Pierre

      Né à Marseille le 10 mai 1894, Pierre Martin, fils d'Etienne Martin, artiste peintre, s’est formé à l’Ecole régionale d’architecture de Marseille avant de rejoindre l’atelier d’Emmanuel Pontremoli à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris en 1923. Il y a pour condisciple Maurice Vieu avec qui il ouvre ensuite une agence au 108, avenue Ledru-Rollin, Paris XIe. Ce cabinet est transféré au 2, rue de la Convention le 1er juillet 1933. On ne connaît pas aux deux architectes d'autre réalisations que celle de la Maison des étudiants indochinois à la Cité. Ils ont aussi participé au concours lancé pour la réalisation de la Maison des Province de France et dressé un projet pour une maison d'étudiantes dans l'îlot est récemment acquis.

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      architecte attribution par source, signature
    • Auteur :
      Vieu Maurice
      Vieu Maurice

      Né à Montpellier le 19 mars 1899, Maurice Vieu s’est formé à l’école régionale d’architecture de Marseille avant de rejoindre l’atelier d’Emmanuel Pontremoli à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris en 1922-1923. Il y a pour condisciple Pierre Martin, dont il devient l'associé au 108, avenue Ledru-Rollin (Paris XIe).

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      architecte attribution par source, signature
    • Auteur :
      Warren Edward
      Warren Edward

      Formé notamment auprès de l’architecte G.F. Bodley, représentant du « gothique victorien », Edward Prioleau Warren (20 Bedford Square à Londres), a rejoint en 1892 l’Art Workers’ Guild, organisation créée en 1884 par un groupe d'architectes britanniques proches des idées de William Morris et du mouvement Arts & Crafts. Il a exercé une grande partie de son activité à Oxford, où son frère était président du Magdalen College. Il est principalement connu pour la construction de bâtiments privés qui s’inspirent des styles anglais de la fin du XVIIe siècle (logements pour des collèges d'Oxford, petites maisons de campagne).

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      architecte attribution par source

L'architecture

Le sol constitué par le remblai des anciennes fortifications et miné de nombreuses carrières, a nécessité l’exécution d’importantes substructions. Le bâtiment se compose d’une partie principale au nord et de deux ailes en équerre tournées vers le sud (l'aile est occupée par les étudiantes comme la partie centrale, l'aile ouest par les étudiants). Le corps central et l’aile est comprennent deux niveaux de sous-sol, un rez-de-chaussée surélevé, 3 étages carrés et un étage de combles ; l’aile ouest sur terre-plein comporte un étage de plus ainsi qu’un grenier avec lanterne à l’angle du corps central dite « belvédère ». Une tourelle existe sur la façade est, couverte en tuiles plates vieillies comme les autres combles. Les murs extérieurs, à ossature de béton armé, portent un parement de brique rouge sombre très soigneusement jointoyée. Les encadrements de baies, les meneaux et les bandeaux d’étage et de couronnement sont en pierre artificielle taillée et sculptée. Les fenêtres sont à croisées métalliques à petits carreaux, en général à 3 vantaux dont 2 ouvrants et un fixe. Le caniveau en briques et ciment qui fait le tour du bâtiment forme une cour anglaise sur la façade nord de l’aile ouest, où une rampe donne accès au sous-sol. Le jardin intérieur est clôturé par un muret en briques avec couronnement de pierre. Un grand perron donne accès au jardin intérieur ; le sol de la première volée est en béton translucide, les autres marches en briques, matériau utilisé aussi pour les garde-corps. Sur la façade nord, un grand perron semi-circulaire encadré de jardinières donne accès, par une porte en fer forgé à deux vantaux, au porche d’entrée.

Les façades s’inspirent de l’aspect général des élévations dressées par Edward Warren (projet du British Institute) et du style Queen Ann, qui à la fin du XIXe siècle, fait la synthèse entre les éléments vernaculaires et l’architecture anglaise des XVIIe et XVIIIe siècles. Elles se composent d’une succession de « maisons » avec pignons se découpant dans la toiture et bow-windows partant du sol. Les baies à meneaux, les têtes de gouttières et tuyaux de descente en plomb ouvragé se réfèrent aussi à la tradition.

L'aménagement

Le vestibule et le hall

Le Collège doit revêtir un caractère aussi anglais que possible, jusque dans le détail de son ameublement intérieur. La Fondation nationale souhaite par exemple grouper sur les murs du hall ou des salons des gravures évocatrices de la vie anglaise et particulièrement de la vie universitaire. « A côté des vues des vieilles universités britanniques », pourraient figurer quelques portraits, quelques autographes, quelques diplômes, qui ajoutent à la valeur spirituelle de l’institution ». Sollicité par Honnorat, T. J. Guéritte, met en branle les 38 comités de l’Alliance française, de façon à « toucher des gens capables de faire le geste désiré […] dans toutes les régions du Royaume-Uni. En plus des lettres et des démarches personnelles », [….] « une note » sera diffusée « dans quelques-uns des grands journaux comme le Times, le Morning Post et le Telegraph ».

A l’entrée du Collège, André Honnorat souhaite faire placer les sceaux des anciennes nations française et anglaise de l’université de Paris. Le 18 février 1936, il fait déposer chez le concierge de la fondation deux moulages « qu’il appartiendra [aux architectes] de faire apposer en même temps qu’une inscription commémorative ». Dans le vestibule, de chaque côté de la porte d’entrée, et sous la reproduction de ces écussons, le sculpteur Soleau fait figurer, sur commande directe des architectes, un rinceau et deux allégories, la Lecture et la Méditation.

Les dispositions générales du grand hall sont inspirées des habitudes anglaises et spécialement des halls des maisons aristocratiques et des clubs. Les travaux de menuiserie, ainsi que ceux du vestibule et des salons, sont confiés le 10 janvier 1935 à l’entreprise Louis Marest (80bis et 82 rue d’Alleray). Dans les quatre pièces, ce décor est constitué par un revêtement d’appui de 1, 10 m de hauteur, avec bâtis en noyer et panneaux en acajou d’Afrique, très courant dans le mobilier anglais. Le même lambris revêt les piles du grand hall, formant des colonnes octogonales. Composés de 14 marches avec palier de repos et palier d’arrivée semi-circulaire, les deux escaliers à l’anglaise conduisant aux petits salons, ont une rampe à balustres et une crémaillère en noyer ornée de sculptures. Les baies donnant sur le jardin, ainsi que celles du vestibule donnant sur l’allée centrale de la Cité, sont garnies de vitraux à dessins géométriques (rectangles de 0, 20 x 0, 12) en verre martelé, de tons fumés jaunes et verts, sertis de plomb ; des vitraux identiques, fournis par la même entreprise Pierre Villette, mais composés de rectangles de 0, 17 x 0, 15, équipent aussi la salle des petits déjeuners, côté cour anglaise. Le plafond à caissons est de style Renaissance élisabéthaine. Le sol est revêtu d’un parquet Noël en mosaïque de bois (composée de lamelles de teck du Siam ou de makoré) formant un dispositif de carrelage. Les appareils d’éclairage (17 « plafonniers décor bronze médaille ») sont commandés par les architectes à la maison Francis Hubens (Art et luminaire, 68 rue des Archives) début février 1936 (elle fournit également la lanterne en fer forgé du porche et les 9 plafonniers décor nickel chromé des escaliers).

Pour meubler le grand hall, 20 fauteuils en noyer teinté patiné, couverts de maroquin grain chagrin, vert foncé, d’après le modèle soumis par les architectes Martin et Vieu et la décoratrice Jeanne Margair, attachée à leur cabinet (2 rue de la Convention), sont commandés le 13 mai 1936 (ainsi que 7 tables et 28 chaises en chêne ciré, avec siège recouvert de maroquin grain chagrin rouge pour la bibliothèque). Mais le hall, « qui n’a été conçu que comme un lieu de passage », est « ouvert à tous les vents », constate le directeur dans son rapport moral du 31 décembre 1937, et reste à transformer en un salon de conversation où les résidents auraient plaisir à se regrouper ; il préconise pour ce faire de « clore partiellement les baies qui relient le hall au vestibule et de reprendre l’ameublement sur un plan d’ensemble qui comporterait des sièges en nombre suffisant et d’un caractère en rapport avec la dignité et la beauté de la pièce ». Le 31 mars 1938, un appel est adressé aux maisons qui se sont partagé la fourniture du mobilier des chambres, leur projet devant être établi d’après les indications fournies par le directeur. Celui-ci a pris conseil auprès du décorateur Pierre Devèche qui donne son point de vue le 8 avril 1938 : « Les meubles de « l’âge du chêne », Tudor, Elisabethan, etc, étant d’un aspect sévère qui ne permet pas de réaliser l’ambiance accueillante et confortable désirée pour cette maison, nous nous sommes arrêtés à la belle époque Queen Anne. Ce style, déjà choisi pour l’extérieur de la maison, convient d’autant mieux qu’il marque un très grand progrès dans l’évolution du confort des sièges. A ces qualités de confort tout à fait adapté aux conceptions modernes s’ajoute un aspect décoratif plein de caractère. Ces différentes qualités nous ont semblé bien appropriées à la destination du mobilier […]". Le parti consiste à créer dans le hall des « groupes » de sièges facilitant la conversation et répartis en nombres inégaux : 2, 3, 4 et davantage. "Pour éviter l’aspect monotone d’une grande quantité de sièges semblables, nous avons constitué des groupes composés de canapés, de grands fauteuils confortables, de fauteuils plus légers, de chaises et de tabourets […] Dans le but de faciliter la disposition des groupes de conversation dans ce hall très ouvert de tous côtés, nous avons proposé de placer dans l’entre-colonnement central, en haut des marches, une boiserie de 1 m 75 de hauteur et largement ajourée depuis 0, 75 m du sol". Ce motif screen qui, dans les demeures médiévales ou Tudor, sépare le hall du vestibule et accentue encore le caractère britannique, « permet d’adosser une table et 2 fauteuils constituant un groupe supplémentaire. Sa hauteur a été réglée de manière à ce que, vu du hall, il dégage les motifs sculptés des blasons des universités ornant le dessus de la porte d’entrée de la maison ». Des trois projets dressés par Devèche, Jallot et Printz, c’est le premier, celui de Devèche, qui est choisi par la Fondation nationale. Le 12 mai 1938, elle confirme à ce décorateur la commande de l’ameublement du hall. « Le projet accepté par nous est celui de la proposition B » qui, prévoyant le réemploi du mobilier déjà en place, se compose de trois grands canapés confortables à 3 places, six grands fauteuils, six tabourets, trois guéridons ronds de 60 de diamètre et deux tables rectangulaires de 75 x 45, en noyer patiné et vernis - meubles auxquels s’ajoute le screen en noyer ciré avec ajourages en forme d’écailles sculptées, à poser entre les deux piliers face à l’entrée. Le 6 août 1938, « la boiserie screen est complètement terminée et mise en place, et une partie des meubles est livrée ; le tout sera terminé à la fin août ». Grâce à ces aménagements, « cette grande pièce et ses deux annexes, les tribunes de musique et des périodiques, autrefois déserts et mornes, sont maintenant peuplés tous les soirs par une foule de résidents et résidentes ».

Les escaliers

Cette salle de réunion donne accès aux deux grands escaliers circulaires desservant les parties de l’édifice réservées aux étudiants et aux étudiantes. Celui de droite dessert 6 niveaux, du sous-sol au palier du 4e étage, celui de gauche, 5 seulement, du sous-sol jusqu’au palier du 3e étage. Comme les colonnes et les pilastres d’angle délimitant la cage d’escalier proprement dite, les limons sont en stuc noir imitant le marbre poli. Les rampes, composées d’une main courante en fer et d’un barreaudage vertical en fer méplat avec balustre en fonte séparant les groupes de quatre barreaux, sont fournies par Raymond Subes, pour le compte des ancien établissements Borderel et Robert. Le sol en en mosaïque de marbre à dessins avec rosace au centre est dû aux céramistes Gentil et Bourdet (marché du 4 août 1934).

Les chambres

Le Collège comporte 224 chambres d’étudiants et d’étudiantes et 4 ou 5 chambres de service. Pour la réalisation du mobilier de ces chambres ainsi que de celles du pavillon monégasque, la Fondation nationale décide de faire appel à la concurrence en organisant elle-même un concours. Dans sa séance du 16 novembre 1934, le conseil d’administration prévoit qu’une « liste sera dressée comprenant d’une part des ensembliers pouvant réaliser l’équipement complet d’une chambre, d’autre part des fabricants de meubles qui devront fournir des propositions pour l’ensemble [….] Afin de juger les propositions ou modèles présentés ainsi que pour l’attribution des commandes, le comité s’inspirera des avis d’experts de compétence éprouvée ».

Le programme du concours se base, du point de vue des détails techniques, sur celui qui avait été élaboré en 1932 pour l’ameublement de la Maison des Provinces de France, par Maurice Dufrêne, expert recommandé à la Fondation nationale par la direction des Beaux Arts ; y sont ajoutées une condition limite de prix, fixée à 2800 F (au lieu de 3300 auquel avait abouti le concours ouvert pour les Provinces de France) ainsi qu’une mention stipulant que la Fondation nationale « désireuse d'éviter la monotonie résultant d'une uniformité des chambres », se réserve le droit de partager la commande entre plusieurs concurrents, avec un minimum de 40 unités pour chacun.

Le document rédigé par les architectes Martin et Vieu (10 décembre 1934 puis 5 janvier 1935) fournit la liste des éléments à prévoir, tout en laissant la disposition et la forme du mobilier à la liberté des concurrents : un lit formant divan dans la journée, tête et pied pouvant être réunis par un panneau amovible formant fond d’alcôve ; un meuble bureau à deux tiroirs minimum et dessus en grande partie recouvert de pégamoïd ; des casiers à livres ou des rayonnages pouvant être combinés avec le bureau ; un petit meuble fermant à clé ; un fauteuil et deux chaises, garnis soit de rotin fort soit de pégamoïd ou produit similaire ; des rideaux, stores et descente de lit. Deux ailes du Collège étant réservées aux jeunes filles, les concurrents devront tenir compte de cette destination, les chambres pour étudiantes devant, tant au point de vue esthétique que pratique, se différencier des autres.

Le 1er mars 1935, une lettre circulaire est adressée aux 20 maisons appelées à concourir : Primavera (Grands magasins du Printemps) ; Pierre Devèche ; Schmit et Cie ; Mme Neucioni-Beluze ; Mme J. B. Klotz et Cie ; Eugène Printz ; Vinay et Cie ; Maurice Jallot ; Porteneuve (Ruhlmann) ; Georges Guillemot ; Jean Pascaud ; Robert Lallemant ; Renouvin et fils ; l’Atelier 75 ; Au Bûcheron ; Etablissements Alfred Régy ; David frères (Marseille) ; Paul Charlin (Avon) ; Guillon (Avon) ; Géo Remon, président honoraire de la Chambre syndicale des tapissiers décorateurs. Un délai de deux mois leur est donné pour présenter leurs projets et éventuellement des modèles de chambres, mais le 8 avril, la date limite du concours est reportée au 15 mai – Eugène Printz sollicite un délai supplémentaire pour la remise de ses trois modèles, ayant à préparer pour la même date ses participations à l’Exposition de Bruxelles, au Salon des Artistes décorateurs et à l’Exposition des Artistes de ce Temps (Petit Palais) ; puis sur la demande d’un grand nombre de participants, la date limite est fixée au 15 juin, si bien que le choix des ensembliers n’intervient que le 15 novembre.

Beaucoup de concurrents présentent deux modèles dans chacune des deux fondations ; d’autres se contentent d’en exposer un seul dans chacune d’elles ; quelques-uns n’en installent qu’au Collège franco-britannique, négligeant complètement la Fondation de Monaco. Au total, 29 modèles sont visibles au Collège, 20 à Monaco. Seuls deux concurrents, Charlin et David frères, n’ont envoyé que des projets dessinés.

Grâce à la collaboration des spécialistes de l’Ecole Boulle, tous ces projets, modèles et dessins sont examinés en détail. Georges Rouest, directeur, Laurent Malclès, chef des travaux, Debat, professeur de menuiserie-ébénisterie, Vier, professeur de menuiserie en sièges, Bertet, professeur de tapisserie, se réunissent les 25 et 26 juin, puis les 8 et 9 juillet à la Cité universitaire. En conclusion d’un rapport du 18 juillet faisant part de leurs observations techniques, ils soumettent à la Fondation nationale l’ordre de classement dans lequel ils ont placé les concurrents : en tête Jallot ; puis Devèche et Pascaud ex aequo ; puis Régy, Printz, Porteneuve, Vinay ex aequo ; puis Renouvin, Guillon, Remon, etc.

A partir de ce classement, la Fondation nationale se livre à une série de combinaisons pour à la fois diversifier les modèles des chambres et « répondre, en même temps, au désir légitime des concurrents choisis de ne pas voir s’amenuiser par trop une fourniture pour laquelle ils avaient établi des prix de revient correspondant à des quantités données ». Après de nombreux pourparlers, elle peut arriver à répartir les chambres comme suit : Fondation de Monaco : Jallot, Pascaud, Devêche, Printz, chacun 18 unités ; Collège franco-britannique : -étudiantes : Jallot, 66 unités ; Pascaud, 38 unités ; Devêche, 32 unités. -étudiants : Pascaud, 20 unités ; Devêche, 26 unités ; Printz, 38. Soit au total : Jallot, 84 unités ; Pascaud, 76 unités ; Devêche,76 également ; Printz, 56 unités. Auxquelles s’ajoutent les 4 studios de la Fondation de Monaco commandés aux Etablissements Alfred Régy, qui seuls ont présenté des modèles de studio. Cette combinaison laisse une marge de 4 chambres à Monaco et de 5 au Collège franco-britannique qui permet de reprendre des modèles exposés : pour Monaco, Porteneuve, Régy (2), Vinay ; pour le Collège, Guillon (du côté des étudiants) , Vinay, Rémon et Porteneuve (chez les étudiantes).

L’attribution des chambres et de leurs numéros est notifiée aux ensembliers le 22 novembre 1935 et les marchés sont passés quelques jours plus tard. Pour le Collège franco-britannique, le marché conclu avec Maurice Jallot le 9 décembre porte donc sur l’installation de 66 chambres d’étudiantes (ameublement et tapisserie) conformes au modèle n° 21, soit une chambre à coucher en sycomore méché au vernis comprenant une commode à 2 portes, 1 bureau dessus simili, 1divan-lit avec fond mobile, 1 fauteuil siège garniture étoffe, 2 chaises idem, 1 tablette formant table de chevet et tenant après un des montants du lit.Les

57 chambres commandées le même jour à Pierre Devèche correspondent au modèle n° 35 pour les chambres d’étudiantes (32) et au modèle n° 196 pour celles des étudiants (25), présentés sur place et agréés par la Fondation nationale, sous réserve de quelques modifications. Les lit, bureau, commode-bibliothèque,fauteuil (1), chaises (2), exécutés en merisier massif teinté et méché, sont ainsi complétés par un lambris mural saillant en chêne formant table de chevet.

Eugène Printz (marché du 9 décembre) doit réaliser 38 chambres d’étudiants conformes au modèle n° 101, soit une chambre en acajou massif, avec panneaux contreplaqués, cirés, se composant d’un lit à deux dossiers égaux formant divan, le montant du dossier côté mur étant plus grand que le montant côté chambre ; une table de chevet carré, à deux plateaux ; un bureau à deux tiroirs, à l’extrémité gauche, avec rebord formant appui pour livres, et dessus en partie recouvert de pégamoïd assorti à la nuance de la tapisserie ; un bahut, la partie centrale formant avant-corps, fermé par 2 portes pleines, les 2 corps latéraux composés de tablettes fixes formant bibliothèque, les 2 côtés du meubles prolongés au-dessus de la tablette supérieure pour former appui-livres ; 1 fauteuil avec siège garni à élastiques et dossier à pelote ; ainsi que deux chaises. La décoration tapisserie comprend notamment un fond de lit en velours suspendu à une tringle en cuivre.

Enfin Jean Pascaud, par marché du 10 décembre, reçoit commande de 38 chambres d’étudiantes (modèle 206) en merisier verni au tampon comprenant 1 lit-divan, 1 table de bureau, 2 chaises, 1 fauteuil, 1 petite commode et 1 table de chevet ; et de 19 chambres d’étudiants (modèle n° 47) en chêne potassé cérusé verni composées des mêmes éléments, sauf un petit casier mobile à la tête de lit formant table de chevet.

Les travaux sont achevés à la date prévue sur les marchés pour la livraison (8 février 1936) mais leur mise en place est quelque peu retardée par l’état d’avancement des travaux de l’immeuble. La fourniture des luminaires est répartie entre les établissements Perzel (225 lampes de bureau « identiques au dessin remis ») et R. Mathieu, 15 rue Saint-Sébastien, 11e (225 lampes de chevet et 225 appliques de lavabo à monture bronze fondu).

Chaque chambre dispose d'une penderie et toilette avec lavabo fermées par une porte. A chaque étage les installations sanitaires comprennent 4 bains pour les étudiantes et 4 douches et un bain pour les étudiants.

Le jardin

La réalisation du jardin fait partie du programme d’aménagement du parc de la Cité universitaire confié au service des parcs et promenade de la Ville de Paris – bien que dès le début de 1935, les architectes aient « appelé la maison Toutin-Roussel dont ils ont étudié les diverses propositions ». Autour de la fondation, la surface à aménager est de 1450 m2. Dans la cour intérieure, ente les ailes, elle est d’environ 800 m2 comprenant : une cour sablée (385 m2), des pelouses (185 m2), une haie (60 m2), des arbustes en tapis ou en remplissage (130 m2) et 70 ml de palissage en lierre. Les travaux de ce jardin sud sont terminés le 22 septembre 1936, exception faite des arbres (qui doivent être plantés en octobre). En 1939, le directeur Auguste Desclos et A. Honnorat ont l’idée d’un agencement qui « serait tout à fait dans la note anglaise » : plantation d’un arbre vert (par exemple un if taillé) de chaque côté de l’ouverture sur le parc, et installation entre chacun de ces arbres et le coin de l’aile du bâtiment, d’un support léger pour soutenir des rosiers grimpants. Le devis de la maison Hittée (qui fournit la Cité universitaire) étant beaucoup trop élevé, le directeur propose le projet Lajournade, fournisseur de la Sorbonne. Il comporte un treillage constitué par des arceaux – tout à fait comparable à celui qui borde le jardin de la fondation des Etats-Unis -, qui serait complétée par une barrière en fer à deux battants (reproduisant le dessin des grilles des fenêtres des chambres des étudiants). En juin, Bechmann, qui est d’accord pour fermer l’ouverture sur le parc par un portillon en fer forgé, modifie « très heureusement le projet primitif en le limitant à deux arceaux, une de chaque côté du jardin ».

  • Murs
    • brique
    • béton
  • Toits
    tuile plate
  • Plans
    plan régulier en U
  • Étages
    2 étages de sous-sol, rez-de-chaussée, 4 étages carrés, étage de comble
  • Couvrements
  • Couvertures
    • toit à longs pans lanterneau

Documents d'archives

  • AJ16/7011 : création, plans, 1921-1953.

    Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine
  • 20090013/333 : plans d'origine, 1932-1933.

    Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine
  • 20090013/334-335 : aménagement, 1932-1940.

    Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine
  • 20090013/337 : ameublement des chambres, 1934-1938

    Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine
  • AN, 20090013/338 : construction, correspondance architectes, 1932-1936

  • 20090013/1062 : création, 1927-1940.

    Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine
  • 20090013/1063-1964 : fonctionnement, 1923-1983 et 1987-1997.

    Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine
  • AN, 20090013/1066 : création, gestion, finances, 1927-1959

Bibliographie

  • Blanc, Brigitte, La Cité internationale universitaire de Paris, de la cité-jardin à la cité-monde, Lieux Dits, 2017, 390 p.

    p.116-118.
  • Lemoine, Bertrand, La Cité internationale universitaire de Paris, Hervas,1990, 120 p.

    p.76-77.
  • Tarsot-Gillery, Sylviane, (dir) et alii, La Cité internationale universitaire de Paris. Architectures paysagées, L'Oeil d'or, 2010, 63 p.

    p.26.

Périodiques

  • Margerand, Jean-Louis, "Le Collège franco-britannique à la Cité universitaire de Paris", La Construction moderne, 53e année, 1937-1938, p. 510-514.

Date(s) d'enquête : 2011; Date(s) de rédaction : 2017
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