En ce début des années 1920, le domaine de l’industrie automobile connaît une certaine effervescence. Les premières épreuves sportives, l’internationalisation des courses et la quête de records incitent l’industrie française à rester compétitive. Mais le pays accuse un retard en termes de pistes permanentes et d’anneaux de vitesse permettant aux constructeurs de tester leurs véhicules.
Ainsi, l’industriel Alexandre Lamblin (1884-1933), propriétaire du journal l’Aéro-Sports et passionné d’automobile, entreprend-il en 1923 l’aménagement d’un « grand théâtre sportif » au cœur du massif forestier de l’Hurepoix, sur le site du domaine du château Saint-Eutrope.
L’autodrome de Linas-Montlhéry est inauguré le 4 octobre 1924 lors des coupes de vitesse du Salon de l’Automobile. Pour l’occasion, des tribunes en bois sont construites de manière provisoire, en attendant leur remplacement par des tribunes en ciment armé. Plus de cent records de vitesse sont battus dès la première année. Cependant, en raison de la crise économique et des coûts d’entretien trop élevés, l’autodrome est mis en faillite dès 1928, avant de fermer en 1936. Il est racheté trois ans plus tard par l’État, affecté au ministère de la Guerre. Sous l’Occupation, il sert de camp d’internement des Tziganes. Après le conflit, la gestion de l’autodrome est confiée à l’Union technique de l’Automobile, du Motocycle et Cycle (UTAC) qui en fait un centre d’essais techniques. Le lieu accueille par ailleurs la présentation de véhicules anciens et de collection. Dans les années 1960, l’autodrome voit se dérouler deux courses emblématiques que sont les Grands Prix de France de Formule 2, mais également les « 1 000 km de Paris » (de 1956 à 1995), ainsi que les courses motocyclistes dites du « Bol d’or ». Le circuit attire enfin les cyclistes, réunis notamment en 1933 à l’occasion des championnats du monde de cyclisme sur route.
Situé à 25 km de Paris, l’autodrome consiste en un anneau de vitesse de 2,5 km, mesurant jusqu’à 20 m de large dans les virages, dessiné par l’ingénieur-architecte Raymond Jamin. Cette piste ovale présente la spécificité d’être dotée de virages concaves, progressivement inclinés afin de favoriser l’accélération des véhicules au sommet des virages et à l’entrée des lignes droites. L’inclinaison de la route a été étudiée pour que les automobiles atteignent leur point d’équilibre et tournent sans même avoir à tenir le volant et ce jusqu’à plus de 220 km/h.
Les virages reposent sur un ensemble de pilotis bâti en ciment armé. En outre, l’autodrome profite de l’éclairage électrique, permettant de rouler de nuit et ainsi d’engager des records d’endurance. Le circuit est prolongé dès 1925 d’environ 10 km, afin d’accueillir le Grand Prix de l'Automobile Club de France. Après la Seconde Guerre mondiale, l’autodrome est rénové, doté d’une tour de chronométrage, d’une trentaine de stands de ravitaillement, d’un tableau d’affichage, de passerelles destinées au public, de chicanes et de bretelles.
La réalisation de l’emblématique autodrome de Linas-Montlhéry constitue un tour de force majeur, donnant à l’industrie automobile française la possibilité de rivaliser avec ses concurrents anglais, américains et italiens. Il demeure par ailleurs le seul autodrome du monde à avoir conservé l’essentiel de ses dispositions d’origine.