Cet ensemble sculpté est caractéristique du "style 1200". Il peut être comparé à la "vie de saint Etienne" sculptée quelques années plus tard sur le portail gauche du bras sud de la cathédrale de Chartres. Le saint Etienne du trumeau est par ailleurs très proche de celui de la cathédrale de Sens, même si le motif de la crucifixion sur le livre est propre à Meaux. L'ensemble n'a pas été sculpté pour l'emplacement qu'il occupe actuellement, ainsi que le montrent les éléments rognés aux extrémités du registre inférieur du tympan, et le remplissage purement géométrique du registre supérieur. Il pourrait s'agir d'un vestige du portail sud primitif, que l'on aurait déplacé sur le bras nord lors de la reconstruction du transept à la fin du XIIIe ou au début du XIVe siècle. Ainsi s'expliquerait que l'on retrouve la même iconographie, dédiée à saint Etienne, sur les deux portails du transept. Celui du nord était réservé aux clercs, tandis que celui du sud ouvrait sur la ville. Les chanoines auraient ainsi conservé à leur usage un ensemble sculpté plus ancien, trop apprécié pour être détruit. L'ensemble est très abîmé : tous les personnages ont été décapités par les protestants en 1562. On perçoit cependant toujours la très grande qualité de la sculpture, aux drapés fluides et animés. L'analyse stylistique menée par Iliana Kasarska conduit à distinguer deux mains dans cet ensemble. Le premier artiste a travaillé sur le trumeau et la moitié gauche du linteau, le second a achevé la partie droite du linteau. La manière du premier maître se caractérise par des étoffes fines à multiples plis serrés, retombant en courbes molles. Elle s'inscrit dans le même courant que les sculptures de la cathédrale de Sens, notamment le saint Etienne déjà évoqué et les voussures du portail central. Cette main est encore responsable du personnage assis à gauche de la scène de lapidation, mais le reste de la dalle de droite est dû à un autre artiste, dont l'oeuvre se caractérise par des gestes plus contenus, des étoffes plus épaisses et présentant moins de plis, les parties saillantes demeurant lisses. Iliana Kasarska a rapproché le style de ce second maître des sculptures de la cathédrale de Laon.
Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.