Dossier d’œuvre architecture IA75001065 | Réalisé par
Philippe Emmanuelle (Rédacteur)
Philippe Emmanuelle

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.
;
Mercier Marianne (Rédacteur)
Mercier Marianne

Chargée du recensement et de la protection au titre des Monuments historiques

Correspondante du label "Architecture contemporaine remarquable"

Conservation régionale des monuments historiques, DRAC Ile-de-France

Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.
  • enquête thématique régionale
Lycée Bachelard
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Ile-de-France
  • Commune Paris 13e arrondissement
  • Adresse 2 rue Tagore
  • Cadastre 2020 DT 16
  • Dénominations
    lycée, groupe scolaire
  • Parties constituantes non étudiées
    cour, préau

Un établissement de la ceinture rouge de Paris : le lycée Gaston-Bachelard, ancien groupe scolaire mixte

HISTORIQUE ET PROGRAMME

Le lycée Bachelard est construit à partir de 1937, année des plans du projet[1], à proximité immédiate des anciennes fortifications de la Porte d'Italie. À l'origine, cet édifice était un groupe scolaire, pour filles et garçons. Lors de son inauguration en 1938, cet établissement porte l'appellation «Groupe scolaire du 141 avenue d'Italie». Implanté sur le passage Raymond, agrandi également en 1938 et baptisé ainsi avant de prendre le nom de Tagore en 1992, l'établissement longe la voie perpendiculaire à l'avenue d'Italie. Il possède une façade pignon sur cette dernière.

 Ce groupe scolaire appartient à un ensemble d'équipements souhaités par la municipalité parisienne, dans le but de faire face à l'afflux de population provoqué par la construction de la ceinture d'habitations à bon marché (HBM) à la périphérie de la capitale. Présentant une grande unité formelle avec ses semblables, il répond avant tout à des besoins tant sanitaires que sociaux et éducatifs. Dans ce contexte édilitaire qui voit émerger une architecture spécifique aux équipements publics parisiens, ce groupe scolaire met en application les prescriptions hygiénistes qui favorisent des locaux vastes, éclairés et aérés.

 Après la seconde guerre mondiale, ce groupe scolaire devient un lycée industriel puis technique. Entre 1947 et 1951, des crédits sont alloués pour l'aménagement d'un cours complémentaire industriel de garçons spécialisé dans la construction électrique, ainsi que pour l'achèvement des travaux du groupe scolaire[2]. Intégré au second degré comme lycée technique (comme pour le lycée d'Alembert situé dans le XIXe arrondissement)[3], l’établissement devient un collège d'enseignement industriel (CEI) puis un collège d’enseignement technique (CET), formant au certificat d'aptitude professionnelle en deux ans[4]. L'ajout de l'inscription «Lycée industriel» en fer forgé au-dessus du portail droit d'entrée confirme cette transformation.

 Aujourd'hui, c'est un lycée professionnel offrant une formation électrotechnique, dispensée auprès d'environ 300 élèves.

L'architecte

Malgré les rares sources existantes, un document conservé aux Archives de Paris informe de l'identité des maitres d'œuvre, MM. Denis et Creuzot[5], investis de manière égale dans le projet si l'on se fie aux honoraires qui leur sont attribués. Le second est également chargé des travaux d'aménagement du cours complémentaire industriel[6] engagés ultérieurement.

Jean Fernand Alphonse Creuzot (1896-1972)[7] est architecte en chef des Monuments Historiques de 1939 à 1961. Il a été formé à l'École des beaux-arts de Paris et a obtenu son diplôme d'architecte du gouvernement en 1929. Il est également l'auteur du groupe scolaire Jean de la Fontaine au Raincy (93), contemporain de la construction du groupe scolaire 141 avenue d'Italie[8].

[1]Archives de Paris, Pérotin 40125 79 1 78

[2] Archives de Paris, Pérotin 40125 79 1 78

[3] Délibération du Conseil municipal de Paris, 1er juillet 1948

[4] Bulletin officiel de la Ville de Paris, 3-4 mai 1965

[5] Archives de Paris, VM 74 36

[6] Archives de Paris, Pérotin 40125 79 1 78

[7] Jean Fernand Alphonse Creuzot, Notice Base Léonore, cote 19800035/1141/30657

[8] Encyclopédie de l'architecture, Constructions modernes, établissements d'enseignement, écoles, tome VIII, éditions Morancé, Paris, 1939

DESCRIPTION

Implantation dans le tissu urbain

Au croisement de l'avenue d'Italie et de la rue Tagore, ancien passage Raymond, la parcelle étroite s'étend tout en longueur, au sud du 13e arrondissement, et en retrait du boulevard des Maréchaux. Face au lycée se trouve un square, aménagé en même temps que la construction du groupe scolaire. Une statue de Tagore, écrivain, peintre et philosophe indien lauréat du prix Nobel de la paix en 1913 y a été installée. Au-delà du square, vers le sud, allée Marc Chagall, on trouve une réinterprétation du principe des immeubles-villas imaginé par Le Corbusier, et réalisée par Jean Dubus et Jean-Pierre Lott en 1991.

 De l'autre côté du lycée, au nord, se trouvent les immeubles de grande hauteur construits entre 1969 et 1977 dans le cadre de la grande opération urbanistique Italie 13. Ces tours contrastent par leur style et leur échelle avec le lycée Bachelard. L'environnement urbain du lycée est donc architecturalement très éclectique.

 Le plan

 Contraint par l'exiguïté de la parcelle, le lycée s'agence selon un plan en peigne, rigoureusement symétrique et qui occupe toute la longueur du terrain sur un axe est-ouest, en retrait par rapport à la rue. Á l'origine conçu comme groupe scolaire, deux entrées distinctes, l'une pour les filles, l'autre pour les garçons, sont disposées de part et d'autre d'un petit corps de bâtiment central, qui abrite la conciergerie. Chacun des deux vestibules dessert un couloir (appelé galerie sur les plans), qui débouche sur un préau couvert et probablement ouvert sur les cours à l'origine. Deux courtes ailes en retour, à pans coupés, forment les deux dents extrêmes du peigne. La partie centrale concentre les fonctions sanitaires, distribuées autour d'une courette carrée : un cabinet médical, une grande salle de douches, des vestiaires. Ce plan procure à l'édifice une organisation lisible et rationnelle.

 Répartition des espaces

Les espaces sont répartis au sein de l'édifice selon le principe de la séparation des sexes. Les filles à droite, et les garçons à gauche, disposent chacun de leur bâtiment, avec son propre vestibule d'accès couvert d'une coupole en pavés de verre, ses propres circulations verticales et horizontales. Chaque sexe dispose de sa propre cour de récréation. Si cette séparation stricte est aujourd'hui abolie, la distribution a été conservée telle quelle, à quelques modifications d'usage près. Le vestibule de gauche par exemple ne sert plus d'accès pour les garçons mais de salle de pause dans la continuité de la salle des professeurs, elle-même installée dans l'ancien parloir. Au rez-de-chaussée, dans l'aile droite, on trouve un ancien préau désormais clos mais non cloisonné en intérieur, fait suffisamment rare pour être signalé.

Les classes sont réparties dans les étages, sur trois niveaux et éclairées en second jour selon les principes des années 1930 qui favorisent l'éclairage naturel. Si ces dernières ne présentent pas de caractère particulier du côté des filles, une classe de mécanique et une classe de bobinage sont aménagées au premier étage, ainsi qu'une salle de dessin et de technologie au deuxième étage, côté garçons. Une salle dédiée aux arts ménagers et une vaste salle de dessin sont prévues en partie centrale, respectivement au second et troisième étages. Deux autres ateliers, dévolus aux activités manuelles du bois et du fer, sont aménagés au rez-de-chaussée, côté garçons.

L'administration est abritée dans deux bureaux distincts, l'un pour le directeur, l'autre pour la directrice, en partie centrale du premier étage. Leur logement se situe au troisième étage. Celui du gardien se trouve au-dessus de la loge d'accueil.

Deux solariums prennent place au troisième étage, desservis par les escaliers situés aux deux extrémités, donc accessibles aux élèves, respectant ainsi les préceptes hygiénistes de la période.

Le sous-sol abrite les dispositifs techniques, dont l'ancienne chaufferie à charbon en bon état de conservation. Dans le cadre de l'organisation de la défense passive de Paris, une partie de ce sous-sol a été aménagé pour receler des abris blindés.

Enfin, la cour est placée à l'avant du bâtiment, absorbant l'espace résiduel exigu au sud de la parcelle. Le mur délimitant celle-ci est traité en briques rouges, formant un ensemble avec les façades et le mur de clôture du parc voisin. Adossés au mur de clôture, côté rue, ont été aménagés deux préaux ouverts pour abriter les sanitaires. Ces deux bâtiments bas ont été rénovés et refermés en 1984[1].

 La répartition historique des espaces est donc presque intégralement conservée.

 Mode constructif

 Le lycée Bachelard possède une structure en béton et un parement de briques rouge vif, aujourd'hui dans un assez bon état de conservation. Le béton des piliers est laissé apparent au niveau des cours de manière à mettre en valeur un effet de porche. Le béton a été travaillé après décoffrage afin de créer des stries, selon la technique du béton layé : un devis estimatif de travaux précise cette «taille du parement du béton layé à la petite pointe ou à la laye avec ciselure»[2].

 Traitement des façades

 Le traitement des façades s'appuie sur l'esthétique moderniste, privilégiant des volumes géométriques simples, disposés selon un effet d'étagement en escalier de part et d'autre du corps central monumental et soulignés par des lignes horizontales et verticales nettes. Affichant ici la tendance à la monumentalisation des façades que l'on observe dans de nombreuses écoles contemporaines, ce bâtiment unique reflète également l'application des consignes de la Ville de Paris. Par souci d’économie, le fonctionnalisme prévaut et privilégie la sobriété des façades, le soin accordé au calepinage de la brique et au second œuvre, au détriment de l’ornementation. Cette caractéristique devient par ailleurs la marque des équipements publics parisiens relevant des architectes municipaux. Elle sert également la différenciation entre écoles et lycées, ces derniers multipliant les références à l’architecture dite savante.

 Le rythme des façades est scandé par une succession de larges baies marquant les lignes horizontales du bâtiment tandis que les circulations verticales apparaissent clairement lisibles grâce au vitrage continu, tant au niveau du corps central qu'aux extrémités du bâtiment. Le changement de la quasi-totalité des huisseries extérieures est à signaler.

 Décors

Le programme décoratif de cet établissement est assez restreint. Il se compose de deux panneaux sculptés, en pierre et situés dans les halls. Réalisés par M. Le Bourgeois d’après les documents d’archives[3], ils représentent des cartographies imagées, probablement à portée pédagogique : la ville de Paris dans le vestibule de droite et la région Île-de-France dans le vestibule de gauche. La coupe sur l’entrée fournie par les documents figurés conservés sous la cote Pérotin confirme que ces deux panneaux ont été intégrés à l’architecture dès le projet initial.

 Sur le pignon ouest, sur l’avenue d’Italie, se trouve un bas-relief en pierre réalisé par M. Cailly[4], représentant les armoiries de Paris, également prévu et commandé au moment de la construction.

 Les portes d’entrée en fer forgé, réalisées par l’entreprise Baudet-Donon-Roussel[5], sont travaillées selon des motifs floraux particulièrement raffinés et qui correspondent à un décor enfantin assez courant pour la période.

À l’intérieur subsistent quelques revêtements de sol et une petite partie des carrelages muraux d’origine.

 Modifications

De manière tardive mais à une date imprécise, une surélévation est venue se greffer au dernier étage, de part et d'autre du corps central, permettant la création d'un quatrième niveau de classes.

La partie centrale qui abritait au rez-de-chaussée un service médical, des douches et des vestiaires, en application des règlements de 1936, n'a conservé que ses carrelages muraux.

[1] Archives de Paris, 1534 W 773

[2] Archives de Paris, Pérotin 40125 79 1 78

[3]  Archives de Paris, VM 74 36

[4] Ibid.

[5] ibid.

  • Murs
    • béton béton armé
    • brique
  • Toits
    béton en couverture
  • Étages
    3 étages carrés
  • Couvrements
  • Couvertures
    • terrasse
  • Escaliers
    • escalier dans-oeuvre : escalier tournant à retours avec jour
  • Énergies
  • Typologies
    ;
  • Techniques
    • sculpture
  • Statut de la propriété
    propriété de la région, Propriété du Conseil régional d'Île-de-France.
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Protections

  • Précisions sur la protection

    Label Architecture contemporaine remarquable (ACR) décerné en 2020.

Annexes

  • SOURCES
Date(s) d'enquête : 2020; Date(s) de rédaction : 2022
(c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel
Philippe Emmanuelle
Philippe Emmanuelle

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.
Mercier Marianne
Mercier Marianne

Chargée du recensement et de la protection au titre des Monuments historiques

Correspondante du label "Architecture contemporaine remarquable"

Conservation régionale des monuments historiques, DRAC Ile-de-France

Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.