Dossier d’œuvre architecture IA75001062 | Réalisé par
Philippe Emmanuelle (Rédacteur)
Philippe Emmanuelle

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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  • enquête thématique régionale, Architectures du sport en Ile-de-France
Hippodrome de Vincennes
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Ile-de-France - Paris
  • Commune Paris 12e arrondissement
  • Lieu-dit Bois de Vincennes
  • Adresse 2 route de La ferme
  • Cadastre 2022 BH 1
  • Dénominations
    hippodrome
  • Appellations
    Vincennes Hippodrome de Paris, Hippodrome du plateau de Gravelle
  • Destinations
    hippodrome

Comme l'a montré Sophie Cueille [1], la genèse des courses hippiques en France et spécifiquement en Île-de-France reste floue et la grande période de construction des hippodromes dans le pourtour immédiat de Paris s'amorce durant la seconde moitié du XIXe siècle. Dotés de bâtiments pérennes (tribunes, pavillons divers, écuries, manège, etc.), ils s'implantent à Longchamp (1857), Vincennes (1863), Auteuil (1873) et Saint-Cloud (1898-1902). En petite et grande couronnes, ils trouvent une terre d'élection dans les stations de villégiature, comme Maisons-Laffitte, Le Vésinet ou Enghien-les-Bains.

L'hippodrome de Vincennes, également appelé hippodrome du plateau de Gravelle, est inauguré le 29 mars 1863. Premier hippodrome de la société des Steeple-chases, constituée sous la présidence du prince Joachim Murat, il est implanté sur un terrain concédé par la Ville de Paris, en bordure du bois de Vincennes, lieu de promenade apprécié des Parisiens. Les pistes, qui sont liées, forment deux ellipses ; la plus petite mesure 2400 m et la seconde 3500 m. Elles sont recouvertes "d'un gazon très élastique" [2] et surplombées par deux grandes tribunes, "élégantes et spacieuses" [3], qui ont chacune plus de 100 m de long et un soubassement de 4 m. Elles peuvent alors accueillir entre 3500 et 4000 personnes. Ces premières constructions sont parfois attribuées à Alphand, mais elles sont plus vraisemblablement l'œuvre d'un certain Saint-Germain, également auteur des tribunes de fer et bois de l'hippodrome de Deauville-la Touques (Calvados).

Très abimé par la guerre franco-prussienne (au cours de laquelle il sert de champ de tir et de terrain de manœuvres pour l'armée) et trop éloigné des lieux d'entraînement, l'hippodrome de Vincennes, dont le bail est désormais accordé à la Société d'encouragement pour l'amélioration du cheval français de demi-sang, est délaissé au profit de celui d'Auteuil ; il est toutefois reconstruit en 1879 avec un tout nouveau tracé. Il devient progressivement le seul hippodrome parisien dédié au trot. Avec la création du prix d'Amérique (1920), l'épreuve reine de Vincennes instaurée pour couronner le meilleur trotteur, l'hippodrome reprend vie et en 1925, un nouvel hippodrome est construit par Léon Berthault, l'architecte des tribunes de l'hippodrome de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine) en 1902. En 1925, il accueille 68 courses à l'année. Les courses d'obstacles y sont définitivement abandonnées en 1934. Le nombre de paris ne cessant d'augmenter, une nouvelle piste voit le jour en 1952 à l'initiative de René Ballière pour les courses nocturnes.

Mais l'image du "temple du trot" est définitivement conférée à l'hippodrome de Vincennes par le bâtiment qui fait l'objet d'un permis de construire déposé en 1976. Le chantier est un travail ambitieux car il doit se dérouler en site occupé, en maintenant effectives les installations où se tiennent près de 140 réunions hippiques par an.

Le programme de reconstruction comporte plusieurs volets : l'édification d'une tribune couverte de 25 000 places (206 m de long), un restaurant panoramique de plus de 1200 couverts, une salle des pas perdus de 120 m de long avec deux niveaux de mezzanines, des installations de pesage modernisées, des locaux pour la régie des courses, un aménagement paysager intégrant un parking semi-enterré de 2300 places [4]. Les architectes Philippe Monnin et Thierry Mostini, assistés de l'ingénieur Thémis Constantinidis, répondent à ces contraintes par une proposition combinant haute technicité et jeux de transparence.

L'hippodrome de Vincennes comporte aujourd'hui deux pistes : la grande - recouverte de mâchefer, résidu issu de la combustion du charbon, qui permet d'éviter tous les aléas de climat car il absorbe bien l'eau en cas de pluie, peut être arrosé pour que le taux d'humidité reste stable ou salé en cas de gel, tout en apportant un confort aux chevaux- longue de 1975 m ; et la petite piste, longue de 1325 m, qui présente un revêtement similaire.

[1] CUEILLE, Sophie, "Le cheval de course en Île-de-France, une présence architecturale et paysagère", In Situ [en ligne], 18 / 2012.

[2] "Le nouvel hippodrome de Vincennes", Le Constitutionnel, 24 mars 1863.

[3] Idem.

[4] GAILLARD, Marc. Architecture des sports, 107 réalisations exemplaires. Paris : Édition du Moniteur, 1982, p. 160-162.

Etudié et mis au point par l'ingénieur Constantinidis, l'édifice repose sur une structure poteau-poutre d'imposantes dimensions [1]. A un poteau central en acier culminant à 28m de haut vient s'accrocher le spectaculaire porte-à-faux des tribunes. Celui-ci est constitué d'une charpente tridimensionnelle en tubes d'acier d'une trentaine de mètres, qui est équilibrée à l'arrière par une seconde charpente tridimensionnelle, cette dernière formant la couverture de la salle des pas perdus et des halls ouverts au public. Cet élément est ancré au sol sur une file de poteaux en béton précontraint dont le nu extérieur, laissé apparent, dans une esthétique brutaliste, définit la limite de l'édifice du côté des entrées. Implantés obliquement, sur des culées biaises, ces massifs ancrages travaillent à la façon de piquets de tente, qui assument le rôle de contrepoids. Leurs saillants animent la façade postérieure des tribunes d'un subtil jeu de pleins et de vides, entre surfaces vitrées transparentes et pans de béton aveugles. Sous le porte-à-faux de la tribune prennent place deux niveaux de gradins, dont le léger décalage rompt la monotonie.

De manière générale, les architectes ont opté pour un parti permettant une multiplicité de points de vue vers les pistes, la première de 1975m (avec une montée et une descente) et la seconde, de 1325 m, réservée aux courses nocturnes.

A l'est s'étend le quartier des écuries (capacité d'accueil : 140 chevaux) traités en volumes bas autour d'une succession de patios végétalisés. Là encore, l'esthétique brutaliste est à l'œuvre, avec des pavillons de plan rectangulaire couverts en terrasse, mais dotés de massifs couronnements-acrotères en béton strié, laissé brut de décoffrage.

La grande salle des pas perdus est découpée en plusieurs volumes par deux niveaux de mezzanines, auxquelles on accède par des escalators. Cela favorise les effets de points de vue de bas vers le haut - et inversement, ces mezzanines étant conçues comme des belvédères d'où observer le public déambuler dans le vaste hall.

Le dernier étage est réservé aux installations de régie des courses, aux bureaux et à la tribune des juges. Il donne aussi accès à une galerie longitudinale aménagée dans la rive de la structure de couverture. Un système de travelling automatique y était installé pour permettre des prises de vues cinématographiques des courses dans les 180 mètres avant l'arrivée.

Comme celui d'Evry, le nouvel hippodrome de Vincennes constitua à son ouverture un parangon de modernité.

[1] La description qui suit est largement reprise de l'ouvrage de référence de Marc Gaillard : GAILLARD, Marc. Architecture des sports, 107 réalisations exemplaires. Paris : Édition du Moniteur, 1982, p. 160-162.

  • Murs
    • béton béton précontraint
    • acier
  • Toits
    matériau synthétique en couverture
  • Couvrements
    • charpente métallique apparente
  • Couvertures
    • terrasse
  • Escaliers
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune, Propriété de la Ville de Paris, en location à la société Le Trot
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Éléments remarquables
    tribune, restaurant, écurie

Bibliographie

  • GAILLARD, Marc. Architecture des sports, 107 réalisations exemplaires. Paris : Édition du Moniteur, 1982.

    p. 160-162.

Périodiques

  • CUEILLE, Sophie, « Le cheval de course en Île-de-France, une présence architecturale et paysagère », dans In Situ, Le cheval et ses patrimoines (partie 1), n°18, 2012.

Date(s) d'enquête : 2022; Date(s) de rédaction : 2022
(c) Région Ile-de-France - Inventaire général du patrimoine culturel
Philippe Emmanuelle
Philippe Emmanuelle

Conservateur du patrimoine, Région Île-de-France, service Patrimoines et Inventaire.

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